L’expression entre guillemets correspond à une traduction conventionnelle (mais plus ou moins heureuse) de 5 years inflation breakeven (ou Inflation Compensation): il semble acquis dans la communauté financière que cet indicateur constitue la principale boussole de Bernanke dans sa politique monétaire (la discussion houleuse qui a eu lieu hier au Congrès sur la signification du mot « inflation », divisée entre croissance des agrégats monétaires et indice des prix à la consommation avec Ron Paul est éclairante à ce sujet). John Authers a aussi consacré son Short View en partie à ceci (voir ci-contre un graphique extrait de sa vidéo). Le point mort d’inflation, qu’est-ce que c’est ? Eh bien, ça n’est rien d’autre que le spread de rendement entre les TIPS (comprendre les Treasury Inflation Protected Securities) et les Treasuries zero-coupon normales. En théorie, cet écart de rendement est une mesure de ce que le marché s’attend en termes d’inflation dans les 5 ans à venir (parce que pour une raison que j’ignore, les Treasuries considérées sont celles à 5 ou 10 ans): la réalité est plus complexe, comme on l’explique ici. Or, comme Bernanke l’explique bien (et il faut le lire) dans un de ses vieux discours, sa grande idée, c’est de piloter la création monétaire sur la base du point mort d’inflation, et plus particulièrement, en vue de « l’ancrage des anticipations d’inflation » (je cite: successful monetary policies should stabilize, or « anchor, » inflation expectations so as to prevent them from becoming a source of instability in their own right).
La première chose qui saute aux yeux lorsqu’on regarde le graphique à droite (repris ici), c’est que le soi-disant « pic de pessimisme » et « capitulation du marché » du 9 mars 2009 est étrangement concommitant avec une chute très brutale des anticipations inflationnistes telles que mesurées par le spread TIPS/TNote. La baisse de l’indicateur de récession, toujours basé sur les spreads de Treasuries (3 mois/10 ans), couplé à une remontée des anticipations d’inflation semble constituer le principal carburant de la hausse brutale du marché actions telle que constatée actuellement. Tout cela mis ensemble, on arrive à quelques conclusions:
- Bernanke essaie de nous refaire le coup de 2003, à savoir faire repartir le marché actions à l’inflation. Cela donnera pleinement raison aux gars de la Chronique Agora qui continueront, le cas échéant, à observer la valeur du Dow Jones exprimé en or dégringoler régulièrement.
- Ce meme Bernanke joue sa place actuellement puisque son mandat à la Federal Reserve constitue une « expérience grandeur nature » pour décider si oui ou non, ces indicateurs monétaires peuvent permettre de piloter les marchés de façon fiable avec toujours une longueur d’avance.
- Ceux qui suivent (comme moi) les Non-Farm Payrolls sont à coté de la plaque sur la base de ce qui se fait à la FED; en effet, cela constitue un lagged indicator, un indicateur retardé. Bien entendu, on passera sous silence qu’il s’agit jusqu’à maintenant de la seule mesure vraiment fiable de la croissance économique d’un pays: rien n’y fera, c’est trop old fashioned. (là encore, on recommande chaudement de lire ce blog régulièrement)
thx, tres bon art.
Merci, n’hésitez pas à l’enrichir par vos commentaires constructifs!