Cacao / Côte d’Ivoire : l’organe public de régulation refait surface

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Le gouvernement de Côte d’Ivoire a annoncé mercredi qu’il avait décidé de restaurer l’organe public de régulation de la filière cacao, dont le pays est le premier producteur mondial.

Un prix devrait être garanti aux producteurs alors que la libéralisation du secteur était de mise depuis plus d’une décennie.

Le compte-rendu du Conseil des ministres indique en effet qu’un nouvel organe de régulation et de stabilisation de la filière devrait à terme remplace les anciennes structures actuellement en place. Un prix minimum compris entre 50 et 60% du prix international devrait être par ailleurs garanti aux agriculteurs, et ce, pour toute la durée d’une campagne.

Alors que pour la campagne 2011-2012, un prix – indicatif – a été fixé à 1.000 francs CFA (1,52 euro) le kilo, des producteurs se sont d’ores et déjà plaints qu’il ne soit souvent pas respecté par les acheteurs.

En effet, les planteurs ivoiriens ne perçoivent le plus souvent guère plus de 20-30% du prix international, les taxes faisant la différence.

Précisons que la réforme du cacao est une condition majeure posée par le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale (BM) pour un allègement très conséquent de la dette de la Côte d’Ivoire.

La réforme a d’ores et déjà fait l’objet de discussions acharnées entre le gouvernement, la Banque Mondiale et les grands groupes chocolatiers.

Rappelons que la Côte d’Ivoire est le premier producteur mondial de cacao avec près de 35% de parts de marché. Le cacao et le café représentent à eux deux 40% des recettes d’exportation du pays.

Il semble désormais certain que les revenus tirés de la fève ont joué un rôle clé dans le financement du conflit ivoirien depuis 2002. 

Des officiels du gouvernement ont détourné des fonds des institutions nationales du cacao – des organismes qui collectent des redevances auprès des compagnies exportatrices de cacao – qui ont été ensuite utilisés pour acheter des armes. Pour ces raisons, le Conseil de Sécurité des Nations Unies a imposé un embargo sur les armes en Côte d’Ivoire en 2004.

En 1999, le gouvernement ivoirien s’était engagé dans la libéralisation de la filière, à la demande du Fonds monétaire international (FMI) et de la Banque mondiale (BM).

Cette libéralisation a entraîné la suppression de la Caistab, établissement public créé en 1964 et chargé de la commercialisation et la stabilisation des prix du café-cacao.

 

Début janvier,  les ex-dirigeants de la filière cacao de Côte d’Ivoire, accusés de malversations  massives et incarcérés depuis mi-2008, avaient obtenu la liberté provisoire.

Une décision accueillie avec enthousiasme et soulagement par les prévenus, alors que le « procès du cacao » avait été reporté à plusieurs reprises fin 2010.

Ouverte en octobre 2007 à la demande du président Laurent Gbagbo, une vaste enquête judiciaire avait débouché sur l’arrestation en juin 2008 de la quasi-totalité des responsables de la filière, dont des proches de M. Gbagbo.

Trois  responsables d’alors du FRC (Fonds de régulation du café-cacao de Côte d’Ivoire) avaient été entendus par le juge d’instruction dans le cadre d’une enquête sur « détournements de fonds, d’abus de confiance, d’abus de biens sociaux, d’escroquerie, de faux et usage de faux en écriture de commerce ou de banque ».

Plusieurs responsables de la filière cacao avaient été entendus et incarcérés, en particulier les présidents de la Bourse du café-cacao (BCC) et du Fonds de développement pour les producteurs du café-cacao (FDPCC), Lucien Tapé Do et Henri Kassi Amouzou.

Angeline Kili, ancienne conseillère du président Laurent Gbagbo et considérée comme une proche de l’ancien chef de l’Etat,  avait été entendue par un juge en tant que présidente du conseil d’administration du Fonds de régulation du café-cacao (FRC) de Côte d’Ivoire puis incarcérée.

Le directeur général du FRC, Firmin Kouakou, et un cadre de cette structure, Prosper Kouassi, avaient été également entendus par le juge d’instruction en charge de l’enquête et déférés à la maison d’arrêt d’Abidjan.

Les investigations ont mis au jour, « outre les surfacturations, (…) le non fonctionnement de certaines sociétés acquises ou le non reversement des dividendes ainsi que l’absence d’une bonne répartition des ressources et bénéfices aux paysans« , avait alors expliqué le procureur. Le FRC est l’acteur principal de « l’affaire Fulton » qui serait, de source judiciaire, à l’origine de la vaste enquête lancée en octobre 2007 à la demande du président Gbagbo.

Le FRC aurait déboursé 100 milliards de francs CFA (152 millions d’euros) pour une usine de chocolat à Fulton (Etats-Unis) alors que le coût d’acquisition « oscille entre 20,5 et 27,5 Mds FCFA », avait expliqué le procureur de la République d’Abidjan, Raymond Tchimou. 

L’enquête a conduit à un audit des nombreuses structures de gestion et de régulation de la filière café-cacao issues de sa privatisation en 1999-2000. Elle a ensuite refait surface en 2008. A cette date, plusieurs journaux d’opposition avaient ouvertement évoqué une manoeuvre de Laurent Gbagbo à l’approche du scrutin.    
Sources : AFP, Jeune Afrique, Global Witness

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