Les affaires sont les affaires, c’est bien connu. Néanmoins, avec un flegme digne de ses compatriotes , le ministère britannique des Affaires étrangères a démenti vendredi soir que la libération par l’Ecosse du Libyen Abdelbaset Ali Mohamed al-Megrahi, condamné pour l’attentat de Lockerbie, soit liée à des contrats commerciaux avec la Libye. A priori, la « chose » pourrait sembler presque évidente … mais tout de même, cela va mieux en le disant …
Il est vrai que la Libye elle-même met de l’huile sur le feu. Lors d’un entretien télévisé vendredi soir, Seïf al-Islam, fils du numéro un libyen le colonel Kadhafi, a affirmé que la libération d’al-Megrahi était liée au fort intérêt que porte le Royaume-Uni pour les réserves libyennes de gaz et de pétrole.
Ce que nie tout net le Foreign Office, affirmant bien au contraire l’absence de tout « arrangement ». « Toutes les décisions relatives au cas Megrahi ont été exclusivement du ressort de ministres écossais » et d’autorités politiques et judiciaires en Ecosse, a ainsi indiqué un porte-parole du ministère britannique.
« Aucun marché n’a été passé entre le gouvernement du Royaume uni et la Libye concernant le cas Megrahi et les intérêts commerciaux dans ce pays », a-t-il martelé.
Le ministre britannique des Affaires étrangères, David Miliband, s’était auparavant insurgé contre les rumeurs laissant entendre que Londres aurait elle-même souhaité la libération de al-Megrahi afin de permettre d’améliorer les relations commerciales avec la Libye.
Rappelons à toutes fins utiles que la compagnie pétrolière British Petroleum (BP) a signé en 2007 un contrat d’un montant de 900 millions de dollars pour la prospection de gaz et de pétrole sur territoire libyen (terrestre et offshore).
Dans le même ordre d’idées, précisons qu’en 2008, les importations de pétrole de la Libye vers la Grande-Bretagne ont augmenté de 66%. « Juste » retour de chose, les exportations de biens de consommation britanniques vers le pays de Khadafi avaient alors augmenté de 50%.
En août 2007, le patron d’une société d’électronique suisse avait jeté le doute sur la responsabilité de la Libye dans l’attentat de Lockerbie en affirmant qu’une pièce à conviction avait été fabriquée. Pour rappel, suite à cet acte terroriste commis en 1988 au dessus de la ville écossaise, 270 morts étaient à déplorer.
Selon Edwin Bollier, responsable de la société Mebo, spécialisée dans les équipements électroniques pour les forces de sécurité et l’armée, l’un de ses employés a fourni frauduleusement aux enquêteurs un « retardateur » de mise à feu d’explosif qui a ensuite été présenté comme ayant été retrouvé dans l’épave de l’avion.
L’entreprise suisse avait fourni en 1985 à la Libye une vingtaine de retardateurs MST-13, du même type que celui remis aux enquêteurs et « utilisé (lors du procès) pour être présenté comme un élément trouvé sur les lieux de l’attentat à Lockerbie », a accusé M. Bollier. « Les pièces à conviction ont été manipulées et utilisées pour faire le lien entre la Libye et l’attentat », a-t-il ajouté.
M. Lumpert s’était dit « désolé des conséquences » de son silence pour le Libyen Abdel Basset Ali al-Megrahi, alors emprisonné en Grande-Bretagne pour cet attentat, et pour la Libye. No comment …
Le quotidien Le Figaro, qui avait révélé cette information lundi, avait alors estimé que ce nouvel élément « accrédite une thèse entretenue par de nombreuses personnes » selon laquelle « il y aurait eu manipulation dans l’enquête, pour incriminer la Libye , alors que les premières pistes menaient à un groupuscule palestinien prosyrien ». Lors du procès en 2001, les trois juges avaient rejeté une théorie mettant en cause l’Iran, la Syrie et un groupe palestinien, le FPLP-CG, qui auraient agi en représailles à la destruction accidentelle d’un avion iranien par un missile américain en juillet 1988.
Cette annonce intervenait alors que Tripoli avait dit espérer le retour de l’ancien agent libyen Abdel Basset Ali al-Megrahi, après la libération en Libye des infirmières bulgares . Un fils de Mouammar Kadhafi , Seif el-Islam Kadhafi, avait alors affirmé qu’un contrat d’armement avec la France et l’autorisation donnée à al-Megrahi de faire appel avaient joué un rôle important dans la libération des infirmières et du médecin palestinien naturalisé bulgare détenus depuis plus de huit ans en Libye.
Pour rappel, un accord avait été signé le 14 août 2003 entre les familles des victimes de Lockerbie et la Libye. Après avoir obtenu l’extradition des deux Libyens soupçonnés d’être impliqués dans l’attentat perpétré par la Libye le 21 décembre 1988 à Lockerbie, les familles des 270 victimes ont eu droit à un procès contradictoire aux Pays-Bas, à une condamnation effective, puis à la reconnaissance de responsabilité de l’Etat libyen et au versement de dommages et intérêts punitifs de 10 millions de dollars par victime décédée.
De là à ce qu’on nous dise que l’argent versé pour la libération des infirmières bulgares est un « juste » remboursement des sommes versées par la Libye « dans le cadre » de l’attentat de Lockerbie …. avais-je lancé à l’époque …
Sources : AFP, ATS, RFI, Le Figaro, SOS Attentats
La libération de Megrahi était au coeur de contrats, selon Tripoli
La Libye a affirmé que la libération controversée par l’Ecosse d’Abdelbaset al-Megrahi, condamné pour l’attentat de Lockerbie, était au coeur des contrats commerciaux conclus avec la Grande-Bretagne. Londres a fermement démenti tout marchandage.
« Dans tous les contrats commerciaux, de pétrole et de gaz avec la Grande-Bretagne, (M. Megrahi) était toujours sur la table des négociations », a déclaré Seïf al-Islam, un des fils du colonel Kadhafi, dans une interview diffusée vendredi soir sur sa chaîne de télévision Al-Moutaouasset.
« Tous les intérêts britanniques étaient liés à la libération d’Abdelbasset al-Megrahi », a-t-il ajouté dans l’avion qui ramenait l’ancien détenu à Tripoli jeudi. Selon lui, ce dossier était « évoqué à chaque visite en Libye de l’ancien ministre britannique Tony Blair », qui était derrière la signature en 2007 d’un accord pour l’exploration de gaz en Libye.
Le gouvernement britannique a aussitôt démenti tout marchandage. « Il n’y a aucun arrangement », a assuré un porte-parole de Gordon Brown. « Toutes les décisions relatives au cas Megrahi ont été exclusivement du ressort de ministres écossais » et d’autorités politiques et judiciaires en Ecosse, a renchéri le Foreign Office.
Le colonel Kadhafi, qui a reçu M. Megrahi vendredi soir, a de son coté salué le « courage » et « l’indépendance » du gouvernement écossais. Il a aussi exprimé sa gratitude au premier ministre britannique Gordon Brown et à la reine Elizabeth pour avoir « encouragé » cette libération, qui – a-t-il souligné – ouvre la voie à un rapprochement entre Londres et Tripoli.
(ats / 22 août 2009 12:15)
Lockerbie: pas de lien entre BP et la libération de Megrahi, selon Hague
LONDRES – Le ministre britannique des Affaires étrangères William Hague a indiqué à son homologue américaine Hillary Clinton que la libération en 2009 du Libyen Abdelbaset Megrahi, condamné pour l’attentat de Lockerbie, n’avait pas de lien avec l’obtention d’un accord pétrolier impliquant le groupe britannique BP.
Dans une lettre adressée à la secrétaire d’Etat américaine, William Hague, affirme en outre, comme l’avait précédemment indiqué l’ambassadeur britannique à Washington Nigel Sheinwald, que la libération du Libyen en août dernier « était une erreur ».
« Il n’y a pas de preuve corroborant en aucune façon les allégations selon lesquelles BP aurait été impliqué dans la décision du tribunal écossais de libérer Megrahi pour des raisons humanitaires en 2009, ni celles selon lesquelles ce même tribunal aurait décidé sa libération afin de faciliter l’obtention d’un accord pétrolier avec la Libye », affirme le chef de la diplomatie britannique dans cette lettre. Cette dernière a été diffusée samedi par le Foreign Office.
M. Megrahi avait été condamné en 2001 pour l’attentat à la bombe perpétré en 1988 contre un Boeing 747 au-dessus de la ville écossaise de Lockerbie, qui avait fait 270 morts.
La lettre a été envoyée un jour après l’échange téléphonique entre William Hague et Hillary Clinton qui avait pour but premier de préparer la visite du Premier ministre britannique David Cameron, la semaine prochaine à la Maison Blanche.
(AFP / 18 juillet 2010 12h06)