Le gouvernement bolivien, d’Evo Morales, a ordonné lundi par décret la nationalisation de l’entreprise de transport de gaz Transredes, composée des compagnies pétrolières Shell (anglo-hollandaise) et Ashmore (USA), a annoncé le ministre des hydrocarbures, Carlos Villegas.
Dès le lendemain, les compagnies pétrolières présentes en Bolivie ont vivement critiqué cette décision; laquelle renforce par ailleurs les inquiétudes sur la capacité bolivienne à exporter son gaz vers l’Argentine.
Selon les milieux pétroliers, le gouvernement souhaite reprendre le contrôle de la distribution du gaz et renforcer la compagnie d’Etat YPFB, qui manque cruellement de capitaux pour investir.
« La nationalisation de Transredes est un acte historique » a affirmé le ministre des hydrocarbures, en rappelant que le gouvernement avait nationalisé le 1er mai dernier 51% des actions de l’entreprise transportant le gaz au Brésil. M. Villegas a indiqué qu’une négociation avec Shell avait débuté début mai, et que cette dernière avait accepté la décision des autorités boliviennes, contrairement à Ashmore.
Le gouvernement avait annoncé samedi que Panamerican Energy (groupe britannique BP) avait cédé à la compagnie d’hydrocarbures boliviennes d’Etat, YPFB (Yacimientos Petroliferos Fiscales Bolivianos), ses actions de Chaco, l’Etat bolivien possédant désormais plus de 51% de Chaco.
Le 1er mai dernier, le président Evo Morales avait donné un mois à Chaco (BP), Transredes (Shell et Ashmore) et CLBH (Allemagne et Pérou) pour céder la majorité de leurs actions à l’Etat bolivien.
Le gouvernement avait également acheté la majorité des actions de Andina, une filiale de Repsol et YPF (Argentine et Espagne).
Dans un communiqué, la Chambre bolivienne des hydrocarbures (CBH, regroupant les companies pétrolières présentes dans le pays) déplore « la forme employée (par le gouvernement) pour prendre le contrôle de Transredes qui pendant onze ans a fait preuve d’efficacité et de coopération ».
La CBH souligne « le rôle stratégique du transport de gaz par gazoducs et espère que les projets urgents d’agrandissements, pour répondre au déficit de la demande interne et externe, ne seront pas affectés ». Pour rappel, Transredes possédait les gazoducs transportant le gaz vers l’Argentine et le Brésil, deux clients importants de la Bolivie.
La production de gaz de la Bolivie plafonne entre 38 et 40 millions de mètres cubes de gaz naturel et a besoin de 6 à 7 millions de m3 pour son marché interne.
A noter cependant que le président Evo Morales avait signé en 2006 un accord d’intégration énergétique avec le président argentin Nestor Kirchner pour que la Bolivie fournisse 14 millions de m3/j à partir de 2010 et jusqu’à 27 millions de m3/j au bout de vingt ans.
Selon l’analyste économique Gonzalo Chavez, il existe une véritable inquiétude quant à l’impact de ces nationalisations sur les investisseurs et sur la capacité pour la Bolivie de fournir une telle quantité de gaz : « Il y a cinq ans, on faisait 64 perforations par an (pour rechercher le gaz), aujourd’hui on en fait deux », constate le spécialiste.
Se voulant rassurant, le ministre des hydrocarbures, M. Carlos Villas, a affirmé que Transredes se chargerait des investissements comme de la construction des nouveaux tronçons de gazoducs. Le ministre a aussi tenu a affirmé que la Bolivie garantissait « pleinement les investissements dans les projets futurs ».
De son côté, M. Santos Ramirez, le président de YPFB, la compagnie d’Etat des hydrocarbures, a assuré que la Bolivie paierait 241 millions de dollars à Ashmore et Shell pour ses investissements réalisés, après déductions du passif existant.
Les compagnies pétrolières internationales opérant en production sur des gisements de gaz en Bolivie comme Petrobras (Brésil), Total (France), Repsol (Espagne) ou Exxonmobil (USA) ont cessé d’investir à cause des incertitudes politiques et du manque de sécurité juridique, selon la Chambre Bolivienne des Hydrocarbures.
Une première nationalisation avait eu lieu au 1er mai 2006 entraînant une révision drastique des contrats de production mais sans faire toutefois faire partir une seule compagnie pétrolière du pays andin.
La Bolivie possède la deuxième réserve de gaz naturel de l’Amérique du sud avec 48,7 trillions de pieds cubes, derrière le Venezuela.
Elle exporte actuellement 30 millions de m3 de gaz vers le Brésil et entre 2 et 3 millions de m3 (au lieu de 7 millions prévus) vers l’Argentine, des quantités qui ne suffisent pas à satisfaire une demande croissante.
Sources : AFP, Reuters
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