Après nous avoir vanté pendant des années les mérites de la mondialisation, voilà qu’on nous explique aujourd’hui qu’elle est source d’inflation. Réunis le 7 mars à Paris pour un colloque intitulé « Globalisation, inflation et politique monétaire », les banquiers centraux américains et européens ont estimé en effet qu’après 15 années de déclin de l’inflation grâce aux produits des pays à bas salaires, la mondialisation la nourrissait désormais via la flambée des prix des matières premières.
« La flambée actuelle des prix des matières premières, y compris des produits alimentaires ces derniers temps, qui résulte, en particulier, d’une incapacité de l’offre à répondre à la hausse de la demande des pays émergents, nous rappelle que la mondialisation peut aussi entraîner des risques haussiers pour l’inflation mondiale », a notamment déclaré Jean-Claude Trichet, le président de la BCE.
« A bien des égards, le bon temps est derrière nous », a affirmé Christian Noyer, le gouverneur de la Banque de France, qui organisait le colloque. « La mondialisation a sans doute beaucoup aidé les banques centrales au cours de la dernière décennie. Ce n’est plus, aujourd’hui, aussi évident », a-t-il ajouté.
Finis les beaux discours sur les bénéfices de la globalisation en termes de prix, de croissance et d’emploi. Aujourd’hui nos grands argentiers semblent en découvrir les inconvénients : crise du crédit, récession, inflation…
Et si la mondialisation n’était finalement que l’arbre qui cache la forêt ? Sa mise en cause, une façon pour les banques centrales de s’exonérer de leur propre responsabilité dans l’explosion actuelle des prix ?
Car l’inflation est d’abord et avant tout un phénomène monétaire : c’est l’accroissement de la masse monétaire en circulation. Un accroissement qui finit bien sûr par entraîner une hausse des prix, mais dans ce domaine comme dans d’autres, il faut éviter de prendre l’effet pour la cause… Or, depuis des années, la planète est submergée de dollars, d’euros et de yens. Les « planches à billets » tournent à plein régime, à un rythme qui est même devenu infernal depuis la crise des subprimes en août dernier. Cette folle expansion du crédit et de la monnaie est devenue tellement visible que les Etats-Unis ont tenté d’en casser le baromètre en mars 2006 : ils ont cessé à cette date de publier l’agrégat M3, qui mesure l’ensemble des liquidités immédiatement disponibles, ou à très court terme, pour l’économie. Malheureusement, il existe un autre signe qui ne trompe pas, c’est le cours de l’or. Valeur refuge traditionnelle en temps de crise et rempart contre l’inflation, le métal jaune ne cesse en effet de s’apprécier : depuis 2001 contre le dollar, depuis 2005 contre toutes les devises. L’once d’or tutoie désormais les 1000 dollars et tout laisse penser qu’elle les dépassera largement.
La hausse des prix de l’énergie et des produits alimentaires est incontestablement liée à un déficit de l’offre par rapport à la demande : il y a pénurie, ou du moins raréfaction de certaines matières premières. Mais au-delà, il faut bien comprendre que l’inflation n’est rendue possible que par la surabondance de liquidités sur la planète. Lorsque la quantité d’argent disponible augmente proportionnellement plus vite que la quantité de biens et de services produits, le prix de ces biens et de ces services augmente. Et comme les salaires ne suivent pas, le pouvoir d’achat des consommateurs diminue.
Si ceux qui ont pour mission de défendre la valeur de la monnaie ne l’avaient pas manipulée depuis des années, la question brûlante du pouvoir d’achat ne se poserait sans doute pas aujourd’hui ! Baisse des taux directeurs, injections de liquidités dans les circuits financiers pour éviter le « credit crunch », relancer la demande, la croissance et – surtout ? – doper des marchés financiers en pleine déprime… Entre purge des excès et récession d’un côté, laxisme monétaire et bulles spéculatives de l’autre, Alan Greenspan et Ben Bernanke ont choisi sans hésiter la seconde option. Résultat : une bulle chasse l’autre. Après l’éclatement de la bulle des valeurs « techno » en 2000-2001, l’éclatement de la bulle immobilière aujourd’hui… et celui de la bulle des matières premières dans quelques années ? Le drame, c’est qu’au lieu de laisser le système financier payer les conséquences de ses dérives, quitte à en passer par une récession, on prétend soigner le surendettement et la surchauffe par une politique plus inflationniste encore. Le remède est pire que la maladie.
Mais l’Europe ? La BCE ne s’est-elle justement pas érigée en gardienne de l’orthodoxie monétaire, conformément à ses statuts ? L’euro fort n’est-il pas le résultat d’une gestion rigoureuse, au grand dam d’un certain nombre de responsables politiques qui crient au suicide économique – et réclament qu’à côté de la lutte contre l’inflation, on assigne à l’institut de Francfort un mandat de défense de la croissance et de l’emploi ? A l’inverse des Etats-Unis qui font de l’emploi une obsession, en Europe le classique arbitrage entre inflation et chômage ne s’est-il pas toujours fait en faveur de la stabilité des prix ?
Le jugement est pertinent si l’on s’en tient au niveau des taux d’intérêt pratiqués. Depuis 2005, le resserrement est continu et la BCE résiste depuis l’été dernier au chant des sirènes de la dévaluation. L’évolution de M3, en revanche, est inquiétante. Avec 10% environ de croissance annuelle depuis 2000, elle dépasse de très loin la valeur de référence de 4,5% que s’était fixée la banque centrale (2% d’inflation + 2% de croissance + 0,5% de correction). En d’autres termes, la création de monnaie en zone euro a suivi une pente aussi laxiste qu’outre-Atlantique. Du reste, si la BCE continue de publier M3, elle l’a déclassée en juillet 2003 en ne la considérant plus que comme un indicateur parmi d’autres. Son niveau élévé n’est plus tenu pour nécessairement générateur d’inflation.
Comment se fait-il alors que l’inflation officielle ait été contenue si longtemps à 2% environ, avant de s’emballer dernièrement ? Où était passée cette masse d’argent non traduite dans les prix ? L’explication se trouve dans le mode de calcul du taux d’inflation : en sont exclus les prix du logement, de l’immobilier et des actifs financiers… au motif qu’ils seraient des investissements et non des biens de consommation. Pendant que la « mauvaise inflation » (celle de la vie de tous les jours, des prix à la consommation et des salaires) restait sous contrôle, la « bonne inflation » des actifs financiers et immobiliers pouvait, elle, s’épanouir en toute liberté… D’où les bulles boursière et immobilière, qui se dégonflent actuellement au profit d’une valorisation des matières premières.
On comprend mieux dans ces conditions pourquoi la Fed et la BCE ont littéralement volé au secours des places financières à partir d’août 2007. Il s’agissait de faire en sorte que ces milliers de milliards ne partent pas en fumée, le temps pour les gros investisseurs de se reporter sur d’autres actifs… L’inflation était pour Keynes « l’euthanasie des rentiers ». Grâce au zèle de nos banques centrales, elle est simplement cachée pour servir de carburant aux marchés.
A lire également :
Excellent article, merci, l’explication est juste et limpide, pour l’heure les marchés refusent encore de le voir mais leurs actifs valent dors et déja beaucoup moins que leur valeur « faciale », plus dure sera la chute…http://lemondequivient.typepad.fr/mon_weblog/2008/03/il-nest-de-pire.html
Trés bon article, merci encore pour ce travail…
Bonne journée
Super! A l’heure ou le Dow nous fait un +2.6% sur de la manip’ de banques centrales, on en redemande …
Oui, c’est ce qui s’appelle un hasard heureux… au moment même où je mettais en ligne ! Une confirmation de plus de cette incroyable fuite en avant…
Bonsoir,
Concernant les hydrocarbures je ne pense pas qu’il y ait raréfaction bien au contraire.
Pour exemple l’exploitation des sables bitumineux de l’Alberta ou des pétroles lourds de l’Orénoque face à l’envolée des prix du pétrole devient plus que rentable. Si on prend compte les progrès techniques à venir et la relance de zones jusqu’ici délaissés (offshore par exemple) il y a plusieurs milliers de milliards de barils supplémentaires qui pourront être mis sur le marché.
Il n’y a donc vraisemblablement pas de raréfaction concernant les réserves mais plutôt un plafond des capacités de production. La demande augmente plus vite que l’offre sur le marché et les pays émergents ayant besoin des hydrocarbures pour stimuler leur croissance sont prêts à mettre le prix pour se procurer ces matières premières dont leur économie ont tant besoin.
L’OPEP par exemple n’a plus beaucoup de marge de manoeuvre. Au vu de la croissance de la demande mondiale d’ici trois ans cette organisation n’aura plus de capacités de production non exploitées et elle ne pourra plus du tout mettre davantage de pétrole sur le marché pour faire baisser les cours.
Le pétrole bon marché est fini et il va falloir faire avec.
A Adam : Je ne pensais pas au pétrole en particulier mais à toutes les matières premières. Cela dit, concernant le pétrole, vous avez raison, même si les avis divergent à la fois sur le niveau des réserves réelles, la date du pic de production et le prix à venir du baril… Ce qui semble certain, c’est que les marges de manoeuvre des producteurs se réduisent et que le prix à payer pour les consommateurs ne pourra qu’augmenter fortement à terme…
Quant aux gisements qui deviennent rentables, oui, mais à quel prix pour l’environnement (cf. Alberta) ?
Mon prof de macro recommande ce blog en plus de la lecture de la presse.
Très bon article.
Bonjour,
Olivier, pouvez-vous clarifier un point de votre démonstration?
Y’a t-il selon vous un risque de diffusion de l’inflation des actifs financiers à l’ensemble des prix ?
Et si oui, comment expliquer ce mécanisme alors même qu’à ma connaissance la part des salaires dans la richesse nationale a tendance à reculer en france et dans les autres pays développés, pesant sur la consommation…
Merci de votre réponse et de votre souci pédagogique
A Béotien :
Si je comprends bien votre question, vous trouveriez paradoxal que les prix augmentent alors même que les salaires ne progressent pas ; en bref, pas de hausse des prix s
Olivier,
Merci de votre réponse
Intéressant, le parallèle [inflation – Bulle immobilière] entre 1991 et 2008…
La BCE devra agir si l’inflation reste forte, dit Axel Weber
La Banque centrale européenne pourrait devoir agir sur les taux d’intérêt en raison des tensions inflationnistes, a déclaré un des membres de son conseil des gouverneurs, Axel Weber dans un entretien au Welt am Sonntag.
L’inflation a atteint 3,6% en rythme annuel dans la zone euro en mars, soit nettement plus que le plafond d’un peu moins de 2% que s’est fixé la BCE.
« Je suis préoccupé par le fait qu’en ce qui concerne la conduite de la politique en matière salariale et budgétaire, le taux d’inflation élevé récemment enregistré pourrait se maintenir pour une durée plus longue que nécessaire au-dessus du niveau de tolérance de l’Eurosystème », a déclaré Weber.
« Si les indications de ce phénomène devaient se développer, nous devrions réagir via la politique de taux d’intérêt », a déclaré le président de la Bundesbank.
« Nous observons de ce fait de très près les accords salariaux en cours et les décisions de politique financière », a-t-il indiqué.
La BCE n’a plus modifié ses taux d’intérêt depuis juin dernier. Le principal d’entre eux, le taux de refinancement, se situe à 4%.
http://www.boursorama.com/infos/actualites/detail_actu_marches.phtml?&news=5402226
Comment l’incroyable envolée du prix du fret nous impacte-t-elle ?
La folie s’empare du fret
Jamais les matières premières n’ont été aussi demandées, exportées et importées. Tout autour de la planète, on s’arrache le blé, le riz, le charbon, le brut, l’acier… et pour transporter tout cela, il faut des bateaux. Beaucoup de bateaux car 95% des échanges mondiaux prennent la voie des mers.
110% de hausse depuis janvier dernier
La demande est telle que les prix du fret maritime sec se sont envolés de 110% depuis le creux de janvier et de 155% depuis le 1er janvier 2007. Ils ont même été multipliés par 10 depuis 2002. Par 10 ! A l’époque, livrer une tonne de vrac vous coûtait 10 $. Aujourd’hui, pour acheminer le même volume, il faut débourser plus de 100 $ !
Le coût d’acheminement du minerai de fer du Brésil jusqu’en Chine a doublé depuis février et explique largement la hausse observée.
Le coût du fret dépasse le prix de la marchandise livrée !
Pour être concret, affréter un Panamax — un des plus gros vraquiers en circulation — afin de transporter des céréales d’Europe vers l’Asie, vous coutera 118 000 $ la journée contre 9 400 $ en 2002. Autre exemple : la tonne de charbon livrée par l’Afrique du sud à l’Europe est facturée 52 $ contre 5 $ en 2002.
Les prix du fret sont délirants au point de dépasser de plus en plus souvent le prix de la marchandise transportée ! Envoyer une tonne de fer du Brésil vers la Chine coûte actuellement 108 $ la tonne alors que la tonne de fer en vaut 80 $.
Les indices de fret pulvérisent record sur record
Le plus suivi est le Baltic Dry Index (BDI). Il représente la moyenne des prix pratiqués sur les 24 plus grosses routes mondiales de transport en vrac de matières sèches (minerais, charbon, métaux, céréales, etc.). Il a clôturé à 11 459 points vendredi
Son petit frère, le Baltic Panamax Index, qui représente sept routes dont la plupart concernent les céréales, connaît lui aussi une ascension spectaculaire. Tout comme le Baltic Dirty Tanker Index, qui reflète la moyenne des prix pratiqués sur onze routes de transport de pétrole brut. Les indices s’envolent.
Pourquoi diable un tel engouement ?
Les ports sont ultrasaturés
Partout le tableau est le même : la congestion des ports est chronique. Des conteneurs gigantesques y sont immobilisés et font la queue pour charger/décharger. Une file de camions de déchargement toujours plus longue avec des routiers qui attendent pendant des heures !
La congestion touche tous les grands ports, notamment ceux d’Australie et du Brésil. Dans le port de Ponta da Madeira, d’où partent notamment le fer et les céréales exportés par le Brésil, les marchandises en attente de chargement sont passées en deux mois de 600 000 tonnes à 3 000 000 de tonnes.
A l’échelle mondiale, on manque de cargos tant la demande est intense !
Les pays émergents font exploser la demande et les compteurs : énergie, produits agricoles, minerais… ces matériaux sont indispensables à leur activité économique intense.
Or tout transite par les navires. Et le problème clé est le manque de navires. La quasi-totalité des quelques 6 600 cargos disponibles à l’affrètement naviguent déjà non-stop. Leur nombre est loin d’être suffisant par rapport à la demande de marchandises à transporter.
L’acier, le fer et le charbon : premiers facteurs de hausse
Au coeur de la problématique : l’explosion de la demande et la production d’acier partout dans le monde. Les besoins de la sidérurgie représentent 60% des transports maritimes mondiaux. Or pour faire de l’acier, il faut du fer et du charbon qui viennent notamment du Brésil, d’Australie et d’Afrique du Sud. Un seul chiffre : les importations de fer au départ du Brésil ont atteint en avril un record absolu à 43 millions de tonnes.
Le renouvellement de la flotte est menacé
Dernier paramètre : un cargo, c’est très rentable, mais ça coûte très cher — de 20 à 180 millions de dollars à l’achat en moyenne. Or ces investissements sont financés à 75% par des prêts bancaires.
Un assèchement prolongé du crédit pourrait bien, à terme, handicaper le lancement de nouveaux navires
&CodifAu milieu du marasme financier actuel, il y a néanmoins une bonne nouvelle concernant qui impactera l’inflation. L’indice Baltic ne cesse de plonger 3746 points hier contre 11700 points en juin ce qui devrait limiter la pression inflationiste des matières premières et du coût des transports maritimes.
Cette baise est néanmoins à mettre sur le compte du ralentissement de la croissance et de la demande en Europe principalement.
http://bourse.lesechos.fr/bourse/matieres/details_matieres.jsp?Code=BADI&Place=RMSE-TR=TSB&Secteur=FRET
L’indice Baltic continue de baisser et finissait hier à 3217 points perdant presque 300 points hier. Il était à 11700 points en juin.
http://bourse.lesechos.fr/bourse/matieres/details_matieres.jsp?Code=BADI&Place=RMSE-TR&Codif=TSB&Secteur=FRET
&PlaceL’indice Baltic Dry Index touche un plus bas avec 827 points qui est le niveau atteint après les attentats du 11 septembre 2001 contre 11793 points il y a 5 mois. Le coût du fret maritime a donc été divisé par 14 en 5 mois ce qui aura une conséquence très positive sur le coût des matières premières, les frais de transport et sur l’inflation. Cela veut aussi dire que les échanges commerciaux ont très fortement chuté ces derniers mois.
http://bourse.lesechos.fr/bourse/matieres/details_matieres.jsp?Code=BADI=RMSE-TR&Codif=TSB&Secteur=FRET
si seulement cela était répercuté dans les prix à la consommation …
à propos de l’index Baltic Dry, je vous écris de la république du Panama, pays pour lequel les revenus du transit du fameux canal sont si importants, et principale composante du PIB.
Un emprunt pour l’élargissement de ce canal et la création d’écluses supplémentaires a été voté. Le Panama avait prévu de le financer par:
-l’augmentation des droits de passage
-l’augmentation du trafic en général (super tankers en haut profonde, bateaux de croisière)
Le Panama jusqu’ici était confiant et se croyait en dehors de la crise en tant que pays émergent (la monnaie officielle et le US$ appelé Balboa)…………..
http://thechronicleherald.ca/Business/1079888.html
http://www.iht.com/articles/2008/09/04/business/deal05.php
http://www.bloomberg.com/apps/news?pid=20601086&sid=aPyX8oYi7dCY&refer=latin_america
http://economictimes.indiatimes.com/Shipping__Transport/Box_ship_orders_collapse_Clarkson/articleshow/3537694.cms
Le canal de Suez est aussi en crise profonde…..
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