Le projet de fusion entre Alstom et Areva suscitent quelques inquiétudes, tant au niveau du secteur financier qu’au niveau des salariés et des syndicats.
L’Etat réfléchit actuellement à un éventuel projet d’évolution du capital du groupe nucléaire public Areva, voire d’un rapprochement avec le groupe industriel Alstom, ce qui supposerait d’évincer l’allemand Siemens d’Areva.
L’action Alstom chutait vendredi, tandis que celle d’Areva se repliait, après deux notes d’analystes exprimant des doutes sur l’intérêt d’une fusion pour les deux groupes.
– Areva et Alstom en baisse –
A 17H05 vendredi, Alstom perdait 4,32% à 142,23 euros. Areva abandonnait 1,37% à 719,0 euros, le CAC cédant 0,56%. Les marchés réagissaient ainsi aux des deux rapports commandés par l’Agence des participations de l’Etat (APE) à la banque britannique HSBC et au cabinet américain McKinsey pour étudier les scénarios de refonte du capital d’Areva. Tous deux semblent écarter l’intérêt de la fusion entre Areva et Alstom.
Le quotidien Les Echos affirmait vendredi que les deux conseils appelés à étudier l’avenir d’Areva ont « bel et bien transmis à Bercy leurs premières observations sur la réorganisation de la filière nucléaire et plus particulièrement sur une éventuelle fusion entre Areva et Alstom ». « Il en ressort qu’à leurs yeux, un tel rapprochement ne serait pas forcément le plus intelligent des scénarios », indique Les Echos.
L’action d’Areva, leader mondial du nucléaire a progressé de 454% entre novembre 2002 et juillet 2007, mais reste fragilisée, selon les analystes, par le fait qu’une très faible partie du capital est en Bourse.
Dans une étude publiée le 13 septembre, le Crédit Mutuel CIC avait abaissé sa recommandation sur Areva à « conserver », contre « accumuler » avant, estimant que le leader mondial du nucléaire sortirait perdant d’une restructuration de la filière en France.
Le capital d’Areva est actuellement public à près de 85%, dont 5,2% appartenant à l’Etat et 79% au Commissariat à l’énergie atomique (CEA). Il est déjà ouvert à 4%, avec des actions sans droit de vote cotées à la Bourse de Paris.
– La Société Générale abaisse sa recommandation
La Société Générale a abaissé vendredi sa recommandation sur l’action du groupe Alstom à « conserver » contre « acheter » auparavant, estimant que le scénario de fusion avec le géant du nucléaire Areva lui serait défavorable.
« Suite à une réunion avec Henri Poupart-Lafarge », directeur financier du groupe, « nous avons le sentiment qu’Alstom a une préférence pour une fusion totale des deux groupes », écrit SG dans une note à ses clients, en estimant que c’est à Alstom que cette fusion serait la plus défavorable. La banque recense de nombreux risques: parité d’échange, exécution (en cas d’échange d’actions avec Areva), technologie et politique.
Une analyse du rapprochement actuellement discuté entre Alstom, Areva et le groupe de BTP Bouygues « confirme notre vision légèrement négative », écrivent les analystes de la Banque. SG a un objectif de cours de 145 euros pour l’action Alstom, soit 2,5% sous le cours de 148,90 euros à la clôture de jeudi.
Bouygues, premier actionnaire d’Alstom avec 25% du capital, faisait également les frais de cette analyse, baissant de 1,14% à 60,49 euros vendredi. Sur Areva, SG a maintenu sa recommandation de « vendre » l’action, tout en relevant de 20,3% l’objectif de cours, à 658 euros.
– McKinsey et HSBC réservés –
Une éventuelle fusion entre Alstom et Areva ne générerait pas de synergies directes et ne servirait pas au mieux les intérêts de l’Etat actionnaire, selon les études réalisées par le cabinet de conseil McKinsey et la banque HSBC, mandatés par l’Agence des participations de l’Etat, rapportait vendredi Les Echos.
La nouvelle entité issue d’un tel rapprochement aurait une taille deux fois supérieure à celle de chacun des deux groupes, ce qui leur permettrait de lever plus facilement des fonds, par un « effet de masse », mais une fusion entre le leader mondial du nucléaire et le fabricant de turbines ne permettrait pas de dégager des synergies directes, selon McKinsey.
Selon HSBC, la multiplicité des activités du nouvel ensemble l’exposerait à une décote de conglomérat, qui pourrait diminuer sa valeur de 20%, rapporte le journal. En outre la fusion serait difficile à mettre en oeuvre parce que le marché n’a pas une idée précise de la valeur d’Areva. HSBC « plaiderait pour la mise en Bourse d’une nouvelle portion du capital d’Areva » avant « toute reconfiguration au sein de la filière » selon Les Echos.
– Le comité de groupe européen d’Areva soucieux du projet de fusion –
Le bureau du comité de groupe européen d’Areva a tiré vendredi « la sonnette d’alarme sur les conséquences sociales et industrielles d’une possible fusion avec Alstom« , à laquelle réfléchit actuellement le gouvernement français.
Le bureau, réuni vendredi en session extraordinaire, « suit avec une attention et une inquiétude particulières les manoeuvres en cours pour rapprocher » le groupe nucléaire Areva du groupe industriel Alstom, indique-t-il dans un communiqué. Un tel rapprochement reviendrait à « une privatisation pure et simple du groupe » nucléaire, et « ne pourrait conduire qu’à un éclatement » de ses activités, affirme le bureau. Selon lui, « les conséquences sociales seraient désastreuses pour l’ensemble du personnel ».
Le bureau du comité de groupe européen juge « significatif que les salariés d’Areva T and D (anciennes activités d’Alstom) de Grande-Bretagne et d’Allemagne ne veuillent pas retourner chez Alstom ».
– Areva: « dépeçage » pour la CFDT , actionnariat salarial pour la CGC –
L’union fédérale des syndicats du nucléaire CFDT s’est prononcée mardi « contre tout dépeçage » d’Areva, tandis que la CFE-CGC a défendu une part plus importante de l’actionnariat salarial dans le capital du groupe. Selon la CFDT,