Eventuelles réactions sur les marchés à prévoir dès les premières heures de lundi : l’agence de notation Moody’s vient d’annoncer dans un communiqué abaisser les notes de trois grands groupes pétroliers que sont le français Total, l’américain Chevron et l’anglo-néerlandais Shell. Si Total voit sa note diminuer de deux crans, celle de Royal Dutch Shell et Chevron diminue chacune d’un cran.
Arguments invoqués par l’agence de notation : la dégringolade du prix du baril. Une situation qui en devrait pas s’arranger selon elle, prévoyant un cours à 33 dollars en moyenne en 2016, à 38 dollars en 2017 et 43 dollars en 2018.
Moody’s indique que l’abaissement de la note de Total, de Aa1 à Aa3, « reflète principalement l’environnement actuel de prix bas pour le pétrole et le gaz naturel et son impact sur la capacité de l’entreprise à générer des liquidités après plusieurs années d’investissements élevés. » L’agence estime en effet que Total ne devrait probablement pas être capable à court terme de réduire son importante dette.
Face à la chute de ses revenus, le géant pétrolier français a en effet cherché à réduire les sorties de liquidités, en réduisant ses investissements et en cédant des actifs. Mais il a dû néanmoins s’endetter pour payer les dividendes de ses actionnaires. Si Total a encaissé en 2015 22,6 milliards de dollars grâce à ses opérations et ses cessions d’actifs, il a dû décaisser 26 milliards pour ses investissements et ses dividendes. Observant que le taux d’endettement du groupe a baissé l’an dernier à 28 %, Patrick Pouyanné, le PDG de Total, considère qu’il s’agit d' »un bilan sain » qui devrait permettre à l’entreprise de supporter de nouvelles baisses du baril.
Si les investissements de Total atteignaient 26 milliards de dollars en 2014, ils ont désormais fortement décru, s’élevant à 23 milliards en 2015 et devant atteindre 19 milliards cette année. Le groupe, qui a démarré l’exploitation de neuf champs en 2015 espère cette année une hausse de production de 4% à 2,2 millions de barils/jours. Cinq projets gaziers seront lancés lors des prochains mois, dont le gigantesque champ de Kashagan au Kazakhstan à la fin de l’année qui devrait produire 370.000 barils/jours.
Si le groupe a certes réduit la voilure en terme d’exploration, il devrait tout de même y consacrer 1,5 milliard de dollars cette année, soit 50% de plus que BP et Chevron. « La meilleure stratégie pour une entreprise pétrolière, c’est de lancer des projets quand les coûts sont bas » affirmait en février Patrick Pouyanné.
Moody’s ne prévoit pas de faire évoluer à moyen terme la note du groupe pétrolier français, estimant que ce dernier devrait pouvoir améliorer progressivement sa situation financière grâce à la remontée des prix du brut en 2017 et 2018, la hausse de la production et l’accélération des économies de coûts en 2016-2017. L’agence voit également de bon œil le programme de cessions d’actifs avoisinant les 10 milliards de dollars prévu par Total.
S’agissant de Royal Dutch Shell, Moody’s a abaissé sa note d’un cran, de Aa1 à Aa2, l’agence se réservant la possibilité de la dégrader à nouveau à moyen terme.
Si l’agence considère comme un élément positif la récente acquisition du groupe gazier britannique BG, ce dernier pouvant à long terme devenir un contributeur important aux activités de Shell, elle s’attend toutefois à ce que la major pétrolière génère un flux de trésorerie négatif au moins jusqu’en 2017, compte-tenu de la forte probabilité du maintien du prix du baril à un niveau bas.
Chevron a vu quant à lui sa note passer de Aa1 à Aa2, Moody’s indiquant anticiper un flux de trésorerie négatif et un endettement élevé en raison des prix bas du pétrole en 2016 et 2017.
L’agence ne prévoit pas en revanche de modifier son appréciation à moyen terme sur le groupe US, considérant que les coûts opérationnels et les investissements devraient reculer de façon importante au cours des deux prochaines années, Chevron ayant compensé la baisse du prix du baril en réduisant ses dépenses.
Rappelons enfin que début février, Standard & Poor’s a dégradé Shell, plaçant d’autres compagnies européennes (dont Total) sous surveillance.
Sources : AFP, Moody’s, Les Echos, Challenges
Elisabeth Studer – 09 avril 2016 – www.leblogfinance.com
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