Jacques Attali, qui préside la commission pour la croissance mise en place par Nicolas Sarkozy, présentera lundi après-midi au président de la République ses premières propositions, a confirmé samedi le porte-parole de l’Elysée, David Martinon, dans un communiqué.
Alors que le gouvernement table pour 2008 sur une croissance l’économie française de 2,5%, Jacques Attali et sa commission sont chargés de trouver des solutions pour faire encore mieux. Vaste tache quand on sait que des voix de plus en plus nombreuses et non des moindres s’élèvent pour douter de la réalisation du « simple » objectif de 2,5 %.
Les propositions de M. Attali « s’articulent autour de deux grands axes: accroître la concurrence pour augmenter le pouvoir d’achat et mettre la politique du territoire et du logement au service de la croissance », a déclaré M. Martinon. M. Attali exposera, lors d’une rencontre à l’Elysée lundi à 15H30, ses premières propositions sur « ces deux grands thèmes qui correspondent aux priorités du projet économique du président de la République », a-t-il ajouté.
La commission, forte de 43 membres issus de multiples horizons, a été mise en place fin août par Nicolas Sarkozy qui l’a chargée de formuler des propositions, sans aucun caractère coercitif.
Nommé par le président à la tête de cette commission baptisée « pour la libération de la croissance française », l’ex-conseiller de François Mitterrand, a comme objectif d’atteindre une croissance à 5%. Pour ce faire, Jacques Attali veut » créer les conditions d’un choc, inventer des propositions aussi audacieuses que possible ». Et derrière ces mots, pas questions de livrer « un rapport de plus », promet-il. « Le monde enregistre une croissance moyenne de 5% l’an depuis plusieurs années. Il n’y a aucune raison que la France et l’Europe soient à 2% ou 2,5% », conclut-il.
La Commission s’est réunie en fin de semaine pour finaliser un rapport intermédiaire, préalable à celui, définitif, qu’elle doit remettre à Nicolas Sarkozy et François Fillon à la fin du mois de décembre. Ces premiers travaux portent sur la distribution et le commerce, la protection du consommateur, l’amélioration de l’accès au logement et la mobilité résidentielle. Les mesures préconisées pour le revenu des français seront détaillées, elles, dans le rapport définitif.
Le document débute par un train de mesures destinées à « mettre fin aux barrières dans la distribution et le commerce ». Les membres de la Commission insistent sur les échecs des lois Galland, Royer et Raffarin, qui se sont révélées contre-productives en créant des conditions de hausse de prix et en grevant les créations d’emplois du secteur.
Pour la Commission, une abrogation de ces lois serait positive pour la croissance. Elle pourrait conduire à une diminution consolidée de 2 à 4% des prix à la consommation et à une augmentation de pratiquement un million d’emplois dans le secteur du commerce de détail et de l’hôtellerie-restauration. Les gains en terme de croissance pourraient être de l’ordre de 0,8 point de PIB en cumulé sur plusieurs années.
A cette fin, la Commission propose notamment d’instaurer le principe de liberté tarifaire dans la distribution et le commerce de détail, en levant les interdictions de revente à perte et de discrimination tarifaire. « Les enseignes de distribution seraient donc autorisées à pratiquer des prix très bas, à condition que ceux-ci ne soient pas pratiqués par des enseignes en position dominante et qu’ils n’aient pas pour seul objectif ou effet de provoquer la sortie de certains concurrents… Cette levée de l’interdiction aura notamment pour conséquence l’étalement des soldes dans le temps, rendant inutile toute réglementation portant sur leur durée », expose en particulier le rapport.
Autre volet de propositions, la Commission propose de mettre fin aux lois Royer-Raffarin en supprimant les procédures d’autorisation actuelles en contrepartie de l’introduction de dispositions relatives à l’urbanisme commercial dans les schémas de cohérence territoriale (SCOT) et les plans locaux d’urbanisme (PLU). Il faudra également, poursuit le rapport, mieux contrôler les positions dominantes locales dans la distribution et « dynamiser le commerce de détail et les fournisseurs indépendants ».
Libéraliser la grande distribution, revenir sur le principe de précaution, faire sortir de terre des villes nouvelles « vertes »: les premières recommandations de la Commission Attali pour « libérer la croissance » entrent en contradiction flagrante avec le Grenelle de l’environnement, soulignent cependant les associations écologistes.
La Commission Attali et le Grenelle de l’environnement « montrent les limites de l’exercice et la contradiction de deux logiques qui ne semblent pas se croiser« , a déclaré ainsi Nicolas Hulot. Il prône pour sa part une « décroissance » des activités nuisibles à l’environnement, en contrepartie d’une « nouvelle croissance » pour les activités vertueuses comme les énergies renouvelables.
Arnaud Gossement de France Nature Environnement (FNE, 3.000 associations) s’insurge contre la libéralisation totale de la grande distribution, dont les centrales d’achat « imposent des règles draconiennes aux agriculteurs ». « Le modèle agricole que nous défendons n’est pas compatible avec un système où on encourage les très grandes exploitations agricoles », souligne-t-il.
D’autant que la création d’hypermarchés contribue à dévorer l’espace et à bétonner les sols, tout comme la création de villes nouvelles vertes ou « Ecopolis », prônée par la commission Attali. « C’est la fausse bonne idée », s’insurge le porte-parole de FNE. « Ces Ecopolis vont accélérer l’étalement urbain au détriment de la nature et entraîner la construction d’infrastructures routières. Plutôt que de faire des villes nouvelles, il faudrait transformer les agglomérations existantes en villes vertes« , ajoute-t-il.
« A deux semaines de la négociation finale du Grenelle, ces points de vue constituent une ultime et pathétique tentative de retenir une société qui se met en mouvement« , lance Yannick Jadot, de Greenpeace, porte-parole de l’Alliance pour la planète.
« Quand on parle de croissance, on parle de la croissance du PIB », ce qui ne prend pas en compte la dégradation de l’environnement, met en garde Jean-Marc Jancovici expert climat/énergie. « Ce qu’on appelle la croissance revient à manger à vitesse accélérée un capital naturel« , ajoute-t-il.
Selon un premier rapport d’étape, la Commission pour la libération de la croissance présidée par Jacques Attali aurait également l’intention de demander au président de la République de revenir sur le principe de précaution inscrit depuis 2005 dans la Constitution.
Une position aussitôt jugée « réactionnaire » par la secrétaire d’Etat à l’Ecologie Nathalie Kosciusko-Morizet, rapporteure de la Charte de l’environnement, qui avait inscrit de principe dans la constitution en 2005. « Il faut cesser de considérer que l’environnement est une limite à la croissance », souligne-t-elle. Nathalie Kosciusko-Morizet a souligné qu’il y avait dans le principe de précaution « une dimension éthique, mais aussi une nouvelle économie qui se profile derrière tout cela » et qu’il fallait prendre en compte les deux dimensions. « Je ne crois pas que c’est avec plus de croissance qu’on s’en sortira, mais en cherchant les voies d’une croissance plus verte », a-t-elle ajouté.
« La proposition de mettre fin au principe de précaution m’a beaucoup choquée. Jacques Attali pense que c’est un frein à la recherche, je pense qu’il a tort« , a déclaré Valérie Pecresse, ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche sur Public Sénat. Elle a souligné qu’avant d’être inscrit dans la Constitution, le principe de précaution existait déjà dans les lois mais « n’était pas précis. »
Pour la fédération FNE, face aux enjeux écologiques que le « Grenelle de l’environnement » « permet enfin de mettre clairement sur la table », cette demande « dénote une profonde incompréhension de la mise en oeuvre du principe de précaution. »
« Opposer économie, croissance, progrès avec le principe de précaution, c’est une erreur monumentale », renchérit ainsi Arnaud Gossement, son porte-parole. Il rappelle que « si ce principe avait été appliqué quand on était dans une période d’incertitude sur le caractère cancérigène de l’amiante, nous aurions évité aux entreprises les sommes colossales qu’elles investissent actuellement pour désamianter leurs appareils de production ».
Sources : AFP, Reuters, Rtl.be
les conclusions de ce rapport sont choquantes.
JE crois que le principe de précaution, inscrit dans la Constitution française depuis J Chirac est une bonne chose qui nous protège contre les dérapages d’un système parfois trop libéral. L’exemple parfait est la culture d’OGM. La France doit s’opposer à la culture d’OGM en plein champ au nom du principe de précaution : non contrôle de la dissémination, dangers sur l’environnement non maitrisé, risques pour l’homme à long terme.
à ce propos, je vous recommande vivement un reportage de Canal + diffusé il y a qq années sur le sujet. Les spécialistes français qui ont autorisé la culture d’OGM en plein champ en France sont glaçants. Pas du tout rassurants…
http://tw.video.yahoo.com/video/play?vid=253218
Par ailleurs, très bon blog bravo Michel et consorts
Merci jb, ça fait toujours plaisir des felicitations 🙂
Avec de telles propositions issuent de membres n’ayant pour la plus part jamais travaillez en dehors des parquets cirée de la république nous courrons droit dans le mur. Des gens dans la sphère politique depuis 20 ans et la France est toujours en crise, précarise l