Si Paris sera toujours Paris, la Sicile pourrait ne plus être totalement la Sicile, car parfois trop c’est trop !
Jugez plutôt : confrontée à une forte hausse du racket des entreprises de Sicile par la mafia, l’association des entrepreneurs siciliens a décidé de réagir en promettant l’expulsion de ses rangs de tous ceux qui accepteraient à l’avenir de payer le « pizzo », l’impôt mafieux.
Céder c’est accepter … Si les Etats du monde faisaient de même contre le terrorisme …
Cette décision sans précédent a été prise à l’unanimité de la Cofindustria (Confédération patronale) de Sicile réunie samedi en assemblée extraordinaire à Caltanissetta dans le centre de l’île, rapporte dimanche la presse italienne.
L’initiative de cette révolte anti-mafia est venue d’Andrea Vecchio, le président de l’Association des entrepreneurs du bâtiment de Catane qui a reçu quatre menaces de mort en quatre jours à son retour de vacances pour ne pas avoir payé le « pizzo » et dont les engins de chantier ont été attaqués à deux reprises durant cette période. Sympa la Sicile, enfin plutôt quand on « se borne » à être touriste …
M.Vecchio qui vit désormais avec sa famille sous la protection de la police, a écrit au président de la République Georgio Napolitano une lettre dans laquelle il affirme: « On ne peut vivre ainsi. Ce n’est pas seulement nous, les entrepreneurs, qui sommes attaqués, mais l’Etat ». « Au nom de tous les entrepreneurs siciliens (…) nous voulons vivre comme les citoyens d’un pays normal, rien de plus », affirme-t-il.
Le vice-président national de la Cofindustria, Ettore Artioli, lui-même présent samedi à Caltanissetta a pour sa part réclamé l’intervention de l’armée dans l’île en Sicile pour combattre la mafia. Selon M.Artioli toute la puissante Cofindustria d’Italie soutient « le combat pour la légalité » de sa branche sicilienne.
De nouveaux dirigeants plus jeunes ont été désignés à la tête des associations patronales les plus à risques, notamment à Agrigente, Catane et Caltanissetta et plusieurs centaines d’entreprises fantômes qui payaient leur cotisation uniquement pour noyauter les Chambres de Commerce ou les organes associatifs territoriaux ont été exclus des rangs patronaux, a affirmé M.Artioli .
Les sommes rackettées chaque année par la mafia sont évaluées à près de 10 milliards d’euros par an par l’association des entrepreneurs siciliens et peu d’activités économiques échappent à « la Pieuvre ».
Une étude sur « les coûts de l’illégalité » de l’Université de Palerme chiffre à 60 euros par mois en moyenne les sommes exigées par la mafia des petits vendeurs et marchands ambulants de l’île. Le « pizzo » grimpe à 457 euros par mois pour les commerces de détail et à 578 euros par mois pour les auberges et restaurants.
Chaque chantier est taxé entre 2 et 4% de sa valeur par la mafia tandis que les sociétés de construction et d’entretien des routes doivent verser une moyenne de 17.000 euros par chantier, selon cette étude financée par la Fondation Chinnici citée dimanche par le quotidien la Repubblica.
D’Amman, en Jordanie, où il effectuait une visite le président du Conseil Romano Prodi a salué samedi soir le « bel exemple » de civisme donné par la Cofindustria de Sicile en estimant « que la lutte contre la mafia ne serait gagnée qu’avec une réaction de la société civile ». M.Prodi a refusé en revanche d’envisager de déployer l’armée dans l’île en déclarant qu’il pensait « plus efficace la réaction de la société civile ». Ben tiens, on le comprend, si les siciliens sont prêts à se faire justice eux-même sans mouiller l’Etat et sans débourser un centime du budget public, c’est royal !
L’armée italienne n’a plus été déployée en Sicile contre la mafia depuis 1992 à l’époque des « Vêpres siciliennes » quand la mafia avait assassiné les juges Giovanni Falcone et Paolo Borsellino lors de deux attaques spectaculaires qui avaient choqué toute l’Italie.
Les militaires italiens sont tout de même intervenus en Sicile la semaine dernière …appelés à la rescousse pour combattre des dizaines d’incendies d’origine criminelle qui ont fait trois morts mercredi et détruit des milliers d’hectares de forêts, dans des zones parmi les plus touristiques de l’île. Mercredi soir, le ministre de la Défense Arturo Parisi a en effet décidé de mettre des militaires et des hélicoptères de l’armée et de la marine à la disposition de la protection civile pour faire face à la situation.
L’ampleur des incendies et les délais dans l’arrivée des pompiers souvent débordés ont immédiatement provoqué une polémique sur la nature criminelle de la plupart des foyers et sur l’insuffisance des moyens déployés pour les combattre. Plusieurs maires de localités siciliennes cités par la presse italienne ont indiqué leur sentiment d’avoir été abandonnés à leur sort et ont estimé que la chaîne des secours avait mal fonctionné.
Guido Bertolaso, le chef de la protection civile, a affirmé que tous les moyens disponibles avaient été mis en oeuvre et rejeté la responsabilité des pertes en vies humaines sur les pyromanes dont il a regretté que « peu, très peu » soient arrêtés et maintenus en prison. « Ces incendiaires sont démasqués, identifiés, dénoncés puis relâchés », a-t-il regretté jeudi dans des déclarations au quotidien La Repubblica, estimant que dans le cas de la Sicile, la mafia était « certainement » à l’oeuvre dans le déclenchement des incendies…
Où l’on retrouve les mêmes ..
Pour Vincenzo Consolo, un romancier sicilien résidant dans la région cernée mercredi par les flammes, les raisons des incendies « ne sont jamais accidentelles mais toujours criminelles ». « Je crois que nous avons affaire à une mafia plébéienne, à des intérêts criminels qui sont probablement engagés dans la spéculation immobilière ou la reforestation. Ils sont une armée. Après les incendies, quels choix avons-nous? Ou la reforestation ou l’extension du béton. Les deux solutions font l’affaire de la mafia », a-t-il déclaré à La Repubblica.
Sources : AFP
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