Le rapport Syrota fait débat sur solaire et CO2

Solaire_reunionLe Syndicat des énergies renouvelables (SER) a relevé mercredi une « contre-vérité flagrante » en matière d’énergie solaire, dans le rapport du Centre d’analyse stratégique (CAS) conduit par Jean Syrota sur les perspectives énergétiques de la France publié le 9 octobre. Bataille sévère en perspective, le solaire étant accusé de ne pas être aussi écologique que «prévu ».

Mais c’est sur sa totalité que le rapport sur l’énergie à l’horizon 2050 pourrait faire débat. En proposant notamment l’arrêt des investissements dans les biocarburants, Jean Syrota semble faire des propositions plus radicales que celles du Grenelle de l’environnement.

Mis en ligne la semaine dernière sur le site du Centre d’analyse stratégique, le rapport évoque un objectif de réduction des gaz à effet de serre maximum de 2,5 pour la France, qui est « l’un des pays industrialisés les plus performants en termes d’émissions de gaz carbonique par habitant » … ses partenaires étant appelés toutefois à faire plus.

– Le solaire mis en cause –

« Le CAS affirme que le solaire photovoltaïque émet plus de CO2 qu’il n’en économise sur sa durée de vie », déplore le Syndicat des entreprises produisant des énergies renouvelables, dans un communiqué.

« Or toutes les études (…) démontrent qu’une installation solaire photovoltaïque raccordée au réseau rembourse l’énergie nécessaire à sa fabrication et à son installation dans une période entre deux et quatre ans, pour une durée de vie comprise entre 25 et 30 ans », souligne le SER.

Cette « manipulation des informations, du point de vue des émissions de CO2, a particulièrement choqué les professionnels du secteur » et « conduit à s’interroger sur la pertinence de l’ensemble (des) analyses » du rapport, conclut le SER.

– Le rapport Syrota diminue les objectifs de la France sur émission de CO2 –

« Les différents scénarios étudiés ne conduisent pas à diviser les émissions de gaz carbonique en 2050 par plus de 2,1 à 2,4 par rapport à celles de 1990 », écrit Jean Syrota, président de la Commission Energie du CAS. Il estime que « la France devrait vigoureusement pousser l’Union européenne à retenir un objectif de division par 4 » de ses émissions à l’horizon 2050 par rapport à 1990, mais que « l’effort indispensable doit être équitablement partagé au niveau international et spécialement au niveau européen ».

Sur la base de ce critère du « partage des efforts à accomplir » (burden sharing), « à un ‘facteur 4’ européen en 2050 serait associée une division par un facteur de l’ordre de 2,5 des émissions françaises en 2005 », écrit Jean Syrota dans ses recommandations. Il rappelle que l’Union européenne a pris ces premières mesures en ce sens, notamment lors du Conseil européen de mars 2007, en prévoyant la réduction de 20% des émissions de gaz carbonique d’ici 2020.

La France est performante « du fait de la réalisation de son programme électro-nucléaire dans les années 80″, ajoute Jean Syrota. « A l’inverse de la plupart des pays industrialisés, chez qui la production d’électricité engendre une part importante des émissions globales de gaz carbonique, elle ne dispose plus d’aucune marge de progrès dans ce domaine »: « C’est pourquoi elle ne peut pas, sous peine de compromettre gravement sa compétitivité dans le contexte d’une économie mondialisée, poursuivre seule des ambitions par trop décalées par rapport à celles de ses principaux partenaires économiques« .

L’association France Nature Environnement a réagi à l’article à ce sujet paru dans les « Echos », jugeant dans un communiqué que « le rapport Syrota ne doit pas court-circuiter les très grands efforts à faire dans le domaine énergétique« . France Nature Environnement juge en effet que « malgré des émissions par habitant de gaz à effet de serre relativement modérées, la France demeure un très mauvais élève sur le plan de l’énergie »

– Arrêt préconisé des investissements dans le biocarburant –

Alors que les biocarburants divisent les membres du Grenelle, ce rapport demande « l’arrêt des investissements nouveaux » dans la production de biocarburants de première génération, car ils n’utilisent pas toute la plante, « ce qui entraîne des coûts élevés, une utilisation des surfaces agricoles importante et un renchérissement des matières premières concernées (blé, maïs) ».

Il propose néanmoins de développer la recherche sur les biocarburants de deuxième génération, qui utilisent toute la plante pour produire de l’énergie. Si l’on observe l’impact des biocarburants sur la flambée des matières premières agricoles et les prix alimentaires, cette proposition n’est pas dénuée de bon sens.

– Le rapport favorable à une augmentation de la TIPP

Parmi les mesures radicales à prendre, le rapport Syrota propose une augmentation de la taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP) de 3 centimes d’euro par an pour l’essence, et de 5 centimes pour le gazole.

Il suggère le rétablissement d’une vignette automobile sous la forme d’une taxe annuelle pour les véhicules dont les émissions polluantes dépassent les 120 grammes par kilomètre, avec une progressivité visant à pénaliser les plus polluants d’entre eux. Il propose la mise en place, par les collectivités locales, de péages urbains.

– Le CAS table sur un baril de pétrole à 100 dollars après 2015

Le Centre d’analyse stratégique (CAS) table sur une tendance haussière de prix du pétrole à long terme en raison de la « raréfaction progressive des ressources », et prévoit un baril à 100 dollars après 2015. Le rapport table sur « des hypothèses plutôt hautes sur les prix des énergies », avec un baril de brut entre 50 et 80 dollars jusqu’en 2015, entre 100 et 150 dollars de 2015 à 2030 et d’environ 100 dollars au-delà.

A court terme, le rapport note que l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep), est « devenue très vigilante sur les évolutions à la baisse » mais que « l’ajout récent de capacités de production » pourrait permettre un léger repli des prix.

« Ensuite, survient une période d’incertitude correspondant au pic de production des pays non-Opep » (Organisation des pays exportateurs de pétrole), poursuit ce rapport qui ajoute qu’au-delà de 2020-2030, « le prix devrait être dirigé en fonction des substituts vers une valeur estimée à 100 dollars par baril« .

S’il mise sur une « raréfaction des ressources et des matières premières », le rapport de M. Syrota n’anticipe toutefois pas de plafond de la production pétrolière mondiale (« peak oil »), mais une régulation de la consommation d’hydrocarbures liée aux contraintes environnementales, qui devrait aboutir à une stabilisation voire une baisse des prix pétroliers.

– Des propositions pour le secteur des Batiments –

Dans le bâtiment existant, le rapport suggère d’étendre aux propriétaires-bailleurs les avantages fiscaux pour les dépenses favorisant les économies d’énergie et l’utilisation d’énergies renouvelables, en les limitant aux équipements « les plus performants ». Il propose de rendre obligatoire un « ravalement thermique » (isolation) des immeubles dans un délai de dix ans.

Il demande l’installation de compteurs individuels de chauffage et de compteurs d’électricité électroniques et suggère de développer la recherche sur les bâtiments à « énergie positive », c’est-à-dire qui restituent de l’énergie.

Sources : AFP, Associated Press

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(2 commentaires)

  1. Ajoutons que le rendement des cellules solaires augmente en flèche et que les coût de production baisse. On obtient désormais 43% de rendement (50% sont visés au lieu des 25% pour les meilleures cellules commercialisées) et cela avec des procédés industriels beaucoup plus simples et en plus une facilité d’utilisation beaucoup plus grande avec un dispositif optique fixe (1 centimètre d’épaisseur) au lieu des dispositifs de concentration à suivi optique.
    http://www.renewableenergyaccess.com/rea/news/story?id=49483
    Rien n’empêche non plus de fabriquer les cellules solaires à partir d’énergies non polluantes.

  2. je remonte ce post très intéressant.
    le rapport propose de rendre obligatoire un « ravalement thermique » (isolation) des immeubles dans un délai de dix ans.
    ET demande l’installation de compteurs individuels de chauffage et de compteurs d’électricité électroniques et suggère de développer la recherche sur les bâtiments à « énergie positive », c’est-à-dire qui restituent de l’énergie.
    Les compteurs EDF électroniques arrivent d’ici 2015:
    http://www.01net.com/editorial/370728/les-compteurs-electriques-communicants-d-edf-mis-sur-les-rails/

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