Une information qui passerait presque inaperçue dans ce monde de brut … et pourtant, elle a son importance !!!
Alors que nous laissions entendre ici-même que la dégringolade du chute du baril pourrait être une arme redoutable aux mains des lobbys pétroliers de la planète pour affaiblir les pays producteurs de pétrole, l’agence de notation financière Moody’s a annoncé mardi avoir abaissé de deux crans à Caa3 la note du Venezuela. Raisons invoquées : le risque de faillite du pays, producteur de pétrole de tout premier ordre sur le plan international, a nettement augmenté, selon Moody’s. Laquelle estime que le Venezuela se situe désormais dans la catégorie des pays emprunteurs à très haut risque.
Histoire d’appuyer nos impressions premières, l’agence de notation argue pour ce faire que la chute des prix du pétrole était le principal facteur de cette baisse de note. En décembre l’agence Fitch avait également baissé de deux crans sa note évaluant la solvabilité du Venezuela, et pour les mêmes raisons.
Pour 2015, l’agence de notation table sur un déficit courant de 2% du produit intérieur brut pour le Venezuela, le premier depuis 1998.
A noter que cette annonce de Moody’s fait suite au déplacement du président vénézuelien, Nicolas Maduro, dimanche dernier, en Arabie saoudite, autre pays membre de tout premier plan au sein de l’Opep, cartel des pays exportateurs, des entretiens en Iran ayant eu lieu auparavant en vue d’endiguer la dégringolade des cours.
En octobre dernier, le quotidien russe Novye Izvestia déplorait d’ores et déjà que la situation économique du Venezuela s’aggravait au fur et à mesure que le cours pétrolier diminue.
« En dépit de l’optimisme du gouvernement, le marché ne croit pas non plus en un avenir prospère du pays », ajoutait le journal. Lequel précise que les taux d’intérêt pour les obligations de 10 ans avaient atteint 18% la semaine précédente, un niveau record inégalé depuis cinq ans et supérieur à celui des pays les plus endettés, dont l’Ukraine et l’Argentine.
Au final, le quotidien estimait que les obligations du pays étaient devenues les plus risquées du monde. Pire encore, selon lui, le marché se prépare ni plus ni moins au crash financier du Venezuela. D’autant plus qu’en un peu plus d’un mois, le tarif du pétrole vénézuélien avait alors baissé de presque 15 dollars.
Autre élément notable : la chute du pétrole a provoqué une forte baisse des réserves de change du pays. Selon la Banque centrale du Venezuela, ces dernières sont tombées en-dessous de 20 milliards de dollars au mois d’octobre 2014.
Une situation d’autant plus alarmante que la production pétrolière locale ne cesse de diminuer. Durant l’époque Chavez, le Venezuela produisait 3,5 millions de barils par jour, il n’en produit que 2,6 millions aujourd’hui. Autre élément inquiétant : seulement 1,2 million de barils vendu quotidiennement rapportent des devises au pays.
Car le Venezuela pratique une politique de troc et de tarifs bas avec ses voisins de Cuba et d’autres pays des Caraïbes, le pays de Fidel Castro profitant de l’excellent niveau de ses médecins pour s’approvisionner à bas coûts.
Parallèlement, Caracas envoie des milliers de barils en Chine en vue de rembourser les intérêts des prêts de plusieurs milliards de dollars. 800 000 barils sont quant à eux destinés au marché intérieur. Vendus à un prix modique, ils ne rapportent rien au Trésor.
Certes le gouvernement pourrait être tenté d’augmenter le prix de l’essence, mais une telle politique ne ferait qu’accroître une inflation d’ores et déjà record, puisqu’elle dépasse à l’heure actuelle 60% et conduire à l’explosion sociale.
La dévaluation du bolivar, la monnaie du pays, pourrait quant à elle à freiner l’économie du pays, en augmentant le coût des approvisionnements.
Si les marchés vénézuéliens s’avèrent quelque peu pessimistes, en octobre dernier, le président Maduro déclarait encore à qui voulait l’entendre que tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes, et que la dégringolade du cours pétrolier devrait permettre au Venzuela de rebondir après avoir touché le fond.
Mais la situation est loin d’être aussi idyllique …. En effet, le journal vénézuélien El Universal indiquait parallèlement que le Venezuela importait du pétrole pour la première fois dans son histoire. Un porte-conteneurs en provenance d’Algérie devait ainsi arriver le 26 octobre sur les côtes vénézuéliennes avec quelque 2 millions de barils d’un pétrole algérien ultraléger, dénommé Saharan Blend.
Le quotidien espagnol El País, considérait quant à lui qu’il s’agissait d’une « atteinte à la souveraineté d’un pays qui compte les plus grandes réserves pétrolières au monde ». Ajoutant au final que « la chute des prix du pétrole aggrave la crise économique du Venezuela ».
L’importation de ce pétrole algérien léger est destiné à réduire le coût de la transformation du pétrole lourd issu des gisements de la ceinture de l’Orénoque, dans le nord-est du pays.
Le coût élevé du naphta, solvant utilisé par l’industrie pétrolière vénézuélienne en vue de le mélanger au brut avant exportation, grève en effet es comptes de la PDVSA, et ce d’autant plus dans le contexte actuel de baisse des prix du baril. Le gouvernement de Nicolás Maduro a donc choisi de s’approvisionner en pétrole léger d’Algérie pour remplacer le naphta.
Selon un économiste cité par El País, le Venezuela aurait besoin d’un prix du brut à 120 dollars le baril pour espérer maintenir ses dépenses publiques actuelles. « Un prix impensable dans le contexte actuel du marché », estimait par ailleurs le journal espagnol.
Cinquième exportateur mondial du brut et fournisseur majeur des Etats-Unis le Venezuela est un pays dont l’économie est essentiellement basée sur le pétrole. Ce dernier est non seulement le pilier de l’économie vénézuelienne mais aussi celui de la politique diplomatique menée successivement par Hugo Chavez et Maduro. Ressource stratégique, le pétrole vénézuélien constitue en effet un instrument de politique nationale, tout en permettant aux dirigeants du pays d’étendre leur influence dans la région aux moyens d’accords et d’alliances. Leur offrant au final les moyens de mener une véritable « guerre froide » contre les Etats-Unis.
Sources : Presse russe et espagnole, Courrier International
Elisabeth Studer – www.leblogfinance.com – 15 janvier 2015
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