Raymond Barre, brillante figure de l’économie, et ancien premier ministre est décédé samedi à l’age de 83 ans à l’hôpital du Val de Grâce à Paris, où il était hospitalisé depuis avril dernier pour des problèmes cardiaques.
L’ancien homme d’Etat et ancien maire de Lyon avait été hospitalisé à Monaco à la suite d’un malaise survenu dans sa maison de Saint-Jean-Cap-Ferrat (Alpes-Maritimes), avant d’être transféré par hélicoptère le 11 avril vers l’hôpital militaire parisien du Val-de-Grâce et admis au service de cardiologie.
A une insuffisance rénale, dont souffrait l’ancien Premier ministre depuis des années, se sont ajoutés des problèmes cardiaques, avaient indiqué ses proches.
ncRéagissant à la mort de l’ancien premier ministre, le président de la République Nicolas Sarkozy a salué un « esprit libre et indépendant » et un « personnage à part dans le personnel politique français ». « Représentant éminent de l’école française de science économique, il eut la volonté de mettre son savoir au service de la cité, toujours fidèle dans son engagement, à ses convictions européennes, libérales et sociales », souligne l’Elysée dans un communiqué.
L’ancien président Valéry Giscard d’Estaing a de son côté déclaré que « la France vient de perdre un de ses meilleurs serviteurs », en apprenant le décès de son ancien Premier ministre. « Son action s’inscrivait dans la grande ligne de ceux qui depuis Colbert (ministre de Louis XIV) ont construit la prospérité de notre pays », a déclaré VGE dans un communiqué transmis à l’AFP. « Raymond Barre était un homme d’Etat qui ne poursuivait aucun objectif personnel mais qui cherchait à assurer par une compétence exceptionnelle et un travail acharné le bien être de notre pays », a ajouté l’ancien président.
Jacques Chirac, prédecesseur de Raymond Barre à Matignon, a lui aussi tenu à rendre hommage à Raymond Barre, décrit comme « un grand économiste, un homme politique résolument engagé pour la modernisation du pays et un grand Européen ».
« Raymond barre aura incarné toutes les facettes de l’homme politique français et porté haut les valeurs d’exigence morale et de rigueur » indique encore un communiqué de Matignon, qui rappelle que malgré « une courageuse politique d’austérité en réaction aux chocs pétroliers« , Raymond Barre était resté aux yeux des Français « l’un des hommes politiques français les plus respectés et les plus populaires ». Et de conclure : « son parcours démontre qu’il n’y a pas d’autre chemin que de dire la vérité aux Français et de prendre résolument des mesures parfois difficiles« . Petite phrase « introductive » à la mise en place de la TVA sociale et autres mesures de « rigueur » à la rentrée ? …
Raymond Barre était « un homme soutenu, aimé et admiré parce que c’était un homme d’Etat » c‘est à dire « quelqu’un qui met l’intérêt général au-dessus des intérêts particuliers, qui met l’intérêt du pays au-dessus des intérêts de clans, de partis, des personnes », a souligné samedi le président du MoDem François Bayrou, samedi, sur RTL. « Il ne cherchait pas à séduire en entraînant les gens sur des chemins qui étaient sans lendemain. Il cherchait la vérité parce que la vérité est la seule qui permette de construire la confiance. Il faisait cela y compris avec un certain esprit de provocation, il n’hésitait pas à prendre l’opinion à rebrousse-poil, frontalement », a-t-il noté.
Né le 12 avril 1924 à Saint-Denis (Réunion), économiste, Raymond Barre avait été Premier ministre du président Valéry Giscard d’Estaing de 1976 à 1981. Il a été aussi maire de Lyon (centre) pendant six ans, de 1995 à 2001, député centriste du Rhône à partir de 1978, réélu sans discontinuer et candidat malheureux à l’Elysée en 1988, où avec 16,53% au premier tour il avait été devancé par François Mitterrand et Jacques Chirac. Il s’était retiré de la vie politique active en juin 2002.
Professeur émérite des universités, cet européen convaincu a été vice-président de la Commission européenne de Bruxelles, chargé des affaires économiques et financières de 1967 à 1973. Professeur agrégé de droit et de sciences économiques à Sciences Po, Raymond Barre avait fait ses premiers pas en politique en 1959 comme chef de cabinet de Jean-Marcel Jeanneney, ministre de l’Industrie et du Commerce du général de Gaulle.
Il est l’auteur de plusieurs ouvrages, dont un manuel d' »Economie politique » (1955 et actualisé en 1988), utilisé par des générations d’étudiants, livre de référence s’il en est, puisque surnommé le « Barre ».
A lire également :
« L’heure n’est pas à la polémique » pour le Crif
PARIS (AFP) – Le président du Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif) Richard Prasquier a déclaré samedi que « quand quelqu’un meurt, l’heure n’est pas à la polémique », après le décès de Raymond Barre.
L’ancien Premier ministre a tenu à plusieurs reprises des propos qualifiés d' »antisémites » par la communauté juive et une partie de la classe politique.
« C’est quelqu’un qui a été Premier ministre et, de l’avis de tous, un homme d’Etat. Quand quelqu’un meurt, il y a un moment pour que les polémiques s’apaisent et puis ensuite vient le temps de l’Histoire », a déclaré M. Prasquier à l’AFP.
« Pour l’instant, nous sommes dans le temps du deuil mais il est évident que nous maintenons tout ce que nous avons dit, aussi bien lors de l’attentat de Copernic qu’il y a trois mois lors de l’entretien à France-Culture », a-t-il ajouté, s' »inclinant devant la peine de la famille ».
« Le long entretien qu’il a eu à France Culture était vraiment très structuré et réfléchi et témoignait vraiment de la profondeur d’une réaction d’animosité vis-à-vis des juifs qui était intolérable », a cependant relevé M. Prasquier, ajoutant que Raymond Barre l’avait alors « très très très profondément déçu ».
Lors de l’attentat contre la synagogue de la rue Copernic à Paris, le 3 octobre 1980, Raymond Barre, alors Premier ministre, avait déploré « cet attentat odieux qui voulait frapper des Israélites qui se rendaient à la synagogue et qui a frappé des Français innocents qui traversaient la rue Copernic ».
Le 1er mars 2007, il avait estimé sur France Culture qu’on lui avait fait un mauvais procès dans cette affaire, se présentant en victime du « lobby juif », « capable de monter des opérations indignes ».
Il avait également dédouané Maurice Papon et jugé que Bruno Gollnish, élu FN lyonnais, condamné pour des propos négationnistes, était « quelqu’un de bien ».