Boeing:accord avec Airbus peu sûr, retard sur 787 plus que probable …

Airbus_a380_boeing_787Hasard de calendrier ? Stratégie bien rodée ? Alors que selon le Wall Street Journal de mardi, Boeing serait sur le point d’annoncer de nouveaux retards pour le démarrage du 787 Dreamliner, le groupe aéronautique américain estime parallèlement qu’un accord entre les firmes Airbus et Boeing paraît peu probable avant la décision prochaine de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) concernant les subventions accordées au constructeur aéronautique européen.

Une deuxième série d’auditions s’est ouverte mardi à Genève dans le dossier Union européenne (UE) contre Boeing.

« Je serais surpris qu’il y ait un règlement négocié avant que ne soit rendue la décision contre Airbus », a déclaré à la presse l’avocat Robert Novick, du cabinet WilmerHale qui défend les intérêts de Boeing dans le dossier des subventions aéronautiques.

Pour rappel, l’avionneur américain avait porté plainte à l’OMC en octobre 2004 contre les aides au lancement d’appareils, versées par plusieurs Etats européens à Airbus. L’UE avait immédiatement répliqué en portant plainte contre les Etats-Unis, accusés de subventionner Boeing par le biais de contrats d’armement.

Les Européens estiment en effet que l’avionneur américain bénéficie de subventions indues via les contrats que lui attribuent la Nasa et le Pentagone pour la mise au point de technologies militaires utilisées aussi dans les avions civils. Les matériaux composites utilisés dans le nouvel appareil de Boeing, le 787, ont été obtenus par ce biais, dénonce Bruxelles.

Après de nombreux reports dus à la complexité du dossier, la plainte contre Airbus pourrait faire l’objet d’une première décision, remise confidentiellement aux parties en avril prochain, selon M. Novick. La plainte contre Boeing serait tranchée environ six mois plus tard.

Face à une véritable avalanche de bonne foi de part et d’autre, les spécialistes du dossier estiment … que l’OMC pourrait bien renvoyer les deux parties dos à dos en condamnant Washington comme Bruxelles pour subventionnement illégal. Les experts du droit commercial soulignent que les deux avionneurs devront, quoi qu’il arrive, négocier un nouvel accord bilatéral pour limiter les aides d’Etat. D’où l’intérêt d’une entente entre les deux constructeurs.

Les relations plus que chaleureuses qui semblent prévaloir entre George W.Bush et Nicolas Sarkozy auraient pu laisser entrevoir une sortie de l’impasse, mais selon l’avocat, « aucun progrès en direction d’une solution négociée » n’a pu être constaté.

En juillet dernier, Boeing affirmait qu’Airbus reconnaissait désormais que ses aides au lancement de nouveaux avions constituent bien une subvention. « Le différend s’est resserré. Le fait que l’aide au lancement est bien une subvention n’est plus un sujet de discussion. La question est de connaître leur montant », observait alors Bob Novick.

Mais cette interprétation avait bien évidemment été rejetée par Airbus, qui assure que la seule concession faite jusqu’à présent en matière de subventions l’a été par Boeing, qui a reconnu avoir reçu indûment 2,2 milliards de dollars de subventions au titre des « foreign sales corporations », un dispositif fiscal condamné par l’OMC en 2004 … Selon M. Novick, l’OMC devrait cependant évacuer ce point de la procédure justement parce qu’il a déjà été tranché lors d’un précédent différend.

« Nous avons intérêt et sommes disponibles à tout moment pour nous asseoir et discuter d’un réglement négocié avec Airbus », a réaffirmé quant à lui le vice-président de Boeing, Ted Austell. « Mais une telle solution doit traiter de la question des aides au lancement ».

Alors que la Chine, la Russie et d’autres pays envisagent de lancer leurs propres programmes aéronautiques pour concurrencer les deux constructeurs, « Airbus et Boeing de même que les Etats-Unis et l’Union européenne ont un intérêt commun à ce que soit bien définie la participation des Etats à la production aéronautique », a relevé M. Austell. « La Chine et la Russie et d’autres regardent attentivement comment les règles seront appliquées » dans le cas d’Airbus et Boeing, a-t-il ajouté.

Lors des premières auditions contre Boeing en septembre dernier, Bruxelles a estimé que les aides américaines ont érodé la compétitivité de l’avionneur européen, lui faisant perdre 27 milliards de dollars (19 milliards d’euros) entre 2004 et 2006.

Boeing juge ces chiffres « grossièrement gonflés ». « L’argent en provenance du Pentagone et de la Nasa n’est pas une subvention mais un paiement de services rendus », a fait valoir M. Novick.

Les Etats-Unis accusent de leur côté Airbus d’avoir reçu jusqu’à 205 milliards de dollars (148 milliards d’euros) de subventions des Etats européens (Allemagne, Espagne, France et Royaume-Uni). Selon Boeing, la part de marché d’Airbus est passée de 37% en 2001 à 57% en 2006, ce qui prouve que le constructeur européen ne souffre pas d’une concurrence déloyale de la part de Boeing. Argumentation oh combien magnifique, vous en conviendrez !

Mais, de nouveaux retards concernant le démarrage du long-courrier 787 Dreamliner pourraient bien motiver la fougue des américains. Selon le Wall Street Journal, ces nouveaux délais empêcheraient Boeing de livrer autant d’appareils que prévu au cours de sa première année commerciale.

Le groupe, déjà en retard de 6 mois sur son programme initial, continue de se heurter à une série de difficultés et pourrait reporter à juin le premier vol du 787, indique le Journal en citant des sources proches du dossier.

Des retards et ruptures de stocks dans la production de pièces détachées chez ses sous-traitants pourraient l’obliger à décaler tout son calendrier de production, avec une annonce dès mercredi, selon le WSJ. Boeing ne pourrait alors pas livrer les 109 premiers appareils qu’il avait prévu d’ici la fin 2009, et risquerait de devoir verser des millions de dollars de pénalités à ses clients.

Déjà des difficultés de production avaient obligé l’avionneur américain à annoncer début octobre un report des premières livraisons du 787 à fin novembre ou décembre 2008, au lieu de mai 2008 prévu à l’origine. Et le premier vol d’essai avait été reporté à mai 2008 au lieu de fin 2007.

L’article du Wall Street Journal faisait chuter l’action à la Bourse de New York de 4,67 % à 77,86 dollars peu avant la clôture.

Pour réduire ses coûts, Boeing a organisé un système de production complexe et inédit, fondé sur la sous-traitance de nombreuses parties de l’appareil à un vaste réseau de fournisseurs extérieurs. Mais beaucoup d’entre eux auraient du mal à respecter les délais, Boeing ayant les plus grandes difficultés à leur faire accélérer le travail, ajoute le Journal.

L’avion qui doit effectuer le premier vol d’essai n’a pas encore été câblé ni équipé des systèmes de pilotage, et ce vol pourrait ne pas avoir lieu avant juin, neuf fois plus tard que prévu initialement, selon le WSJ.

Pire, cette situation pourrait retarder l’homologation de l’appareil par l’autorité fédérale de l’aviation, (la FAA) à début 2009, ainsi que la livraison des premiers modèles à la compagnie japonaise All Nippon, qui en a commandé 50.

Le principal client du Dreamliner, la compagnie de leasing LLFC (International Lease Finance Corp.), qui en a commandé 74, a minimisé le problème pour le moment, indiquant avoir craint des retards bien plus importants. Selon son PDG John Plueger, mieux vaut un petit retard qu’un avion qui ne serait pas parfaitement au point. « Cet appareil sera la base de tous les nouveaux appareils construits par Boeing à l’avenir, il faut qu’il soit impeccable », a-t-il ajouté.

Sources : AFP, rtl.be

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(3 commentaires)

  1. Très intéressant dans Futura Sciences
    Le 12 janvier 2008 à 12h31
    Soupçons de vulnérabilité informatique… dans le Boeing 787
    Par Jean-Luc Goudet – Futura-Sciences
    Dans le futur modèle de Boeing, le 787, dit Dreamliner, le réseau utilisable par les passagers est physiquement connecté à celui du système de l’avionique. Les responsables américains de la sécurité aérienne réclament des vérifications supplémentaires, craignant que des passagers puissent perturber le pilotage…
    Un rapport de la FAA (Federal Aviation Administration) réclame à Boeing des précisions supplémentaires (special conditions), révèle le magazine Wired. Le document de la FAA, dont une copie est disponible en ligne sur le Web, détaille les inquiétudes des responsables de la sécurité aérienne concernant le 787, surnommé Dreamliner, en phase de certification.
    L’appareil de Boeing (un biréacteur moyen courrier) offre à ses passagers un réseau informatique, permettant notamment de se connecter à Internet. L’avion comprend deux autres réseaux, l’un pour l’avionique, servant au pilotage et à la navigation, et l’autre destiné aux gestionnaires de l’avion, véhiculant des données concernant la maintenance et l’administration. Or, ces trois réseaux ne sont pas isolés les uns des autres. Les responsables de la FAA se posent donc une question : serait-il possible qu’un passager puisse perturber, volontairement ou non, le réseau gérant pilotage et navigation ? Aucun autre avion ne présentant cette curieuse caractéristique, la FAA impose donc à Boeing des demandes d’informations supplémentaires venant s’ajouter aux longues procédures de certifications.
    Des exigences nouvelles pour des fonctions inédites

  2. Le Boeing 787, une proie facile pour les pirates informatiques
    09/01/2008 12:42
    Le Boeing 787, Dreamliner, présente, selon la U.S. Federal Aviation Administration (FAA), une sérieuse faille au niveau de la sécurité de son système informatique embarqué. Dans certains cas, les passagers pourraient même prendre les commandes de l’avion.
    Même si ce scénario peut sembler être un thriller de mauvais goût, le rapport établi par la FAA est on ne peut plus clair: le ‘in-flight entertainment system’ à l’attention des passagers est connecté aux logiciels de commande, de navigation et de communication de l’avion. Et c’est précisément cette connexion physique qui pose un sérieux risque de sécurité.
    Selon les connaisseurs, il serait nettement préférable de garder les deux réseaux informatiques complètement séparés l’un de l’autre. Dans une réaction accordée à Wired, Boeing déclare être conscient du problème et vouloir tester une solution à brève échéance.
    Un porte-parole de Boeing ajoute que la façon dont la FAA présente les choses est quelque peu trompeuse. « Les deux réseaux ont en effet des convergences, mais il est tout aussi vrai que pas mal d’éléments sont entièrement autonomes les uns des autres », déclare-t-il.
    Normalement, le 787 Dreamliner devrait être opérationnel en novembre. A l’entendre, Boeing en aurait déjà plus de 800 en commande. La FAA a entretemps déjà invité Boeing à faire d’abord la démonstration que le problème informatique est résolu.
    Kristof Van der Stadt le Vif.be

  3. NEW YORK (Reuters) – Boeing annonce qu’il repoussera de trois mois environ le premier vol d’essai et les livraisons de son 787 Dreamliner.
    Boeing avait déjà annoncé un retard de six mois pour ce programme en octobre dernier.
    Le constructeur aéronautique a précisé que le premier vol d’essai du 787 aurait à présent lieu vers la fin du deuxième trimestre au lieu de la fin mars précédemment.
    Les premières livraisons sont maintenant projetées pour le début 2009. La précédente prévision de Boeing donnait fin novembre ou décembre de cette année.

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