François Fillon, le Premier ministre français, a mis en garde vendredi à Nicosie contre les risques de guerre civile au Liban, affirmant que Paris est « extrêmement préoccupé » par les violences qui « peuvent conduire à un engrenage, engrenage qui lui-même conduirait à la guerre civile« .
Le Liban se trouve paralysé depuis jeudi (nombreuses routes bloquées, aéroport international fermé) alors que des accrochages armés entre partisans de l’opposition et de la majorité anti-syrienne s’étendent à plusieurs villes du pays.
De violents affrontements ont éclaté dans des quartiers de l’ouest de Beyrouth en réaction au discours du chef du Hezbollah Hassan Nasrallah. Ce dernier a affirmé que le mouvement chiite libanais était prêt à se défendre par les armes après les récentes décisions du gouvernement à son encontre considérées comme une « déclaration de guerre ».
– La France préoccupée par la situation au Liban
« Il faut lever les barrages, il faut rouvrir les routes et l’aéroport. Comme le montre l’histoire du Liban, il n’y a pas d’autre solution que politique« , a ajouté le chef du gouvernement français lors d’une conférence de presse conjointe avec le président chypriote Demetris Christofias.
« Naturellement, notre ambassade est mobilisée pour assurer la sécurité des Français. Elle nous informe en temps réel et nous sommes prêts à réagir à toute évolution de la situation« , a également indiqué M. Fillon.
« Nous soutenons les institutions libanaises, nous soutenons le gouvernement et l’armée à qui il revient de préserver la stabilité et la sécurité du pays« , a ajouté le Premier ministre.
« Les autorités françaises sont mobilisées pour trouver avec tous les acteurs concernés avec lesquels nous sommes en contact permanent, à commencer par la Ligue arabe, une solution politique à la crise« , a-t-il affirmé.
M. Fillon a également indiqué que le ministre français des Affaires étrangères Bernard Kouchner, « doit s’entretenir dans les prochaines heures avec tous les principaux dirigeants du pays afin de contribuer à la reprise du dialogue« .
– Le Hezbollah s’estime face à une déclaration de guerre
Le chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah, a déclaré jeudi que les décisions prises par le gouvernement libanais à l’encontre de la formation chiite étaient une « déclaration de guerre » et « un début de guerre lancée par le gouvernement (…) au profit des Etats-Unis et d’Israël« . Le gouvernement avait décidé mardi d’enquêter sur un réseau de télécommunications qui aurait été installé par le Hezbollah à travers le pays, et de limoger le chef de la sécurité de l’aéroport de Beyrouth présenté comme un proche du mouvement chiite.
« Notre réponse à cette déclaration de guerre est notre droit à nous défendre, de défendre notre résistance, nos armes et notre existence », a insisté Nasrallah, qui s’exprimait par vidéo-conférence.
« Celui qui tirera sur nous, nous tirerons sur lui (…) même s’il s’agissait de nos frères« , a lancé le chef du parti chiite, qui mène l’opposition face à la majorité parlementaire antisyrienne.
Selon Hassan Nasrallah, la crise libanaise qui dure depuis novembre 2006 est entrée « dans une nouvelle phase après les décisions dangereuses » prises mardi par le gouvernement. Après les décisions prises par le gouvernement, une nouvelle phase a commencé », a-t-il affirmé, insistant: « Ces décisions sont dangereuses ».
– Liban : arrêt des combats dans la capitale
Le calme est revenu à Beyrouth après trois jours de combats consécutifs entre la majorité antisyrienne et l’opposition soutenue par Damas et Téhéran. Les combattants du Hezbollah ont pris le contrôle de l’ouest de la capitale.
D’après des sources proches des services de sécurité, le bilan des trois jours d’affrontements entre combattants des deux camps est passé à au moins onze morts et 30 blessés.
En fin de matinée, le Hezbollah chiite, soutenu par l’Iran, et ses alliés contrôlait la totalité de Beyrouth-Ouest, à majorité musulmane. Un peu plus tôt, les hommes fidèles au Hezbollah avaient pris le contrôle de la chaîne de télévision pro-gouvernementale Future News, qui appartient au leader de la coalition au pouvoir Saad al Hariri, et interrompu ses programmes.
D’après des responsables des services de sécurité, les membres du Hezbollah ont pris le contrôle de plusieurs bureaux du Courant du Future de Hariri dans la partie occidentale de Beyrouth puis les ont remis à l’armée libanaise qui tente de préserver un rôle neutre dans la crise.
Le Hezbollah a également resserré son emprise sur les axes routiers menant à l’aéroport international de Beyrouth, pratiquement paralysé depuis mercredi. La compagnie aérienne nationale Middle East Airlines a annoncé le report de tous ses vols prévus d’ici samedi.
– Pas de levée des barrages sans retour arrière du gouvernement affirme le Hezbollah
L’opposition libanaise ne lèvera pas les barrages routiers et le siège de l’aéroport que lorsque le gouvernement reviendra sur ses décisions à l’encontre du Hezbollah et reprendra le dialogue national, a déclaré vendredi un responsable de l’opposition.
« Nous ne menons pas un coup d’Etat. Tout cela est lié aux décisions du gouvernement » d’enquêter sur le réseau de communication du Hezbollah et de limoger le chef de la sécurité de l’aéroport présenté comme un proche du mouvement chiite, a affirmé ce responsable sous couvert de l’anonymat.
« Nous sommes en train de proposer un partenariat (…) et eux veulent monopoliser le pouvoir et limiter notre participation » à la prise de décisions, a ajouté ce responsable.
– Les Etats-Unis : le Hezbollah doit choisir entre terrorisme ou politique
Les Etats-Unis sont « préoccupés » par les affrontements armés de Beyrouth entre le Hezbollah pro-iranien et l’armée libanaise, a déclaré jeudi le porte-parole du département d’Etat, Sean McCormack, réaffirmant le soutien de Washington au gouvernement libanais. Il a qualifié « d’escalade de la tension » les violents affrontements armés qui ont éclaté dans plusieurs quartiers de Beyrouth. Quant au discours de M. Nasrallah, c’était « un acte cynique de manipulation », a-t-il ajouté.
La Maison Blanche a également réclamé jeudi que le Hezbollah chiite libanais cesse immédiatement de « semer le trouble » au Liban, alors que de nouveaux affrontements armés en plein Beyrouth faisaient craindre une escalade militaire.
« Le Hezbollah a un choix à faire entre être une organisation terroriste ou un parti politique, mais il doit cesser d’essayer d’être les deux », a dit un porte-parole de la Maison Blanche, Gordon Johndroe. « Ils doivent cesser tout de suite de semer le trouble », a-t-il ajouté.
– Israël accuse l’Iran
Le président israélien Shimon Peres a accusé vendredi l’Iran de fomenter les troubles au Liban dans le cadre de ses tentatives de « régner sur tout le Moyen-Orient ».
« Ce qui se passe au Liban n’est pas vraiment surprenant (…) C’est un nouveau chapitre de la bataille menée par l’Iran pour régner sur tout le Moyen-Orient », a déclaré le chef de l’Etat, dans une déclaration retransmise par la radio publique.
Il a souligné que cette « nouvelle tragédie » que connaît le Liban n’avait « aucun rapport avec Israël« .
– L’Arabie saoudite appelle à une réunion des ministres arabes
L’Arabie saoudite a appelé vendredi à une réunion d’urgence des ministres arabes des Affaires étrangères pour tenter de mettre un terme aux combats meurtriers à Beyrouth.
« A la lumière de la dangereuse escalade au Liban, le royaume saoudien appuie la tenue d’une réunion extraordinaire d’urgence du Conseil ministériel de la Ligue arabe au Caire pour discuter de la crise libanaise et de ses répercussions« , a indiqué un responsable des Affaires étrangères saoudiennes cité par l’agence officielle SPA.
L’appel a été lancé dans la nuit alors que le Liban était le théâtre de combats entre partisans de la majorité anti-syrienne, soutenue par l’Arabie saoudite (sunnite), et de l’opposition conduite par le mouvement chiite Hezbollah et appuyée par l’Iran (chiite) et la Syrie.
En outre, le quotidien panarabe Asharq Al-Awsat, aux capitaux saoudiens, a rapporté jeudi que l’Arabie saoudite avait commencé à évacuer ses ressortissants du Liban.
Cité par le journal, l’ambassadeur saoudien au Liban Abdel Aziz al-Khoja a indiqué que l’ambassade avait fait évacuer jeudi plus de 70 Saoudiens vers la Syrie par la route, et prévoyait d’en faire partir davantage vendredi.
Le Koweït est également en train d’évacuer ses ressortissants qui le désirent, a rapporté l’agence officielle Kuna. Les Emirats arabes unis ont aussi indiqué jeudi avoir évacué certains de leurs ressortissants vers la Syrie.
Sources : AFP, ats
A lire également :