Poutine met en garde Bruxelles sur tarifs et projets gaziers

Du toupet Mister Poutine ? Vous savez bien que ce n’est pas son style … Cela ressemble plutôt à de la fine stratégie. Alors même que Russie et Bulgarie viennent de s’accorder pour financer le tronçon bulgare du gazoduc South Stream, lui-même « concurrent » du gazoduc européen Nabucco, le Premier ministre russe a vivement critiqué samedi les projets européens de libéralisation du marché du gaz. Mettant en garde contre des défauts de distribution et une hausse des prix. Histoire de booster à sa manière son « partenaire » autrichien OMV, possible Cheval de Troie russe au sein de l’échiquier énergétique mondial à travers la plate-forme de distribution Central European Gas Hub (CEGH) opérée par OMV à Baumgarten ? Ou du moins de lui laisser les coudées franches, tentant d’éviter ainsi que des directives européennes ne freinent ses ambitions. Qui sait …

« Les propositions de la Commission européenne visant à libéraliser le transport du gaz sont bien intentionnées. Mais il est difficile d’estimer les conséquence de leur mise en oeuvre », a ainsi déclaré Vladimir Poutine à la suite d’une rencontre avec son homologue bulgare Boïko Borissov.

Selon lui, les « nouvelles réglementations que préconise l’Union européenne pour le transport de gaz, qui forceraient les sociétés à séparer leurs activités de production et l’exploitation du réseau, représentent certaines menaces« .

Ses arguments ? Le Premier ministre russe s’inquiète que ne soient mises en oeuvre des mesures restrictives de nature à freiner le développement de nouveaux projets d’infrastructure gazière par de « grands acteurs tels que Gazprom ». Nous y voilà ….

Une situation qui pourrait engendrer – selon lui – la stagnation du développement des infrastructures. Laquelle « pourrait nuire à la distribution et générer des hausses de prix ». Selon Vladimir Poutine, en appliquant une telle stratégie, l’Union européenne pourrait courir le risque « que les petites sociétés sans expérience dans la production et le transport de gaz fassent grimper les coûts en s’immisçant dans les principaux pipelines de transit ». De ce fait, il propose que « ces propositions » fassent «  l’objet de nouvelles expertises avant d’être mises en oeuvre ». Mais, comme souvent les propos de Moscou sont loin d’être dénués d’intérêts … Vladimir Poutine tentant d’effrayer Bruxelles pour se placer en sauveur …

Rappelons toutefois à toutes fins utiles, qu’en décembre 2009, OMV, le premier groupe gazier et pétrolier d’Europe centrale, et la Bourse de Vienne ont créé une « Bourse du gaz ».

Son ambition ? Devenir numéro un en Europe continentale …. en partenariat avec le géant gazier russe Gazprom. Comment ? via la plate-forme de Baumgarten qui permet – notamment – d’assurer la livraison du gaz russe à l’Europe occidentale, disposant ainsi d’une position stratégique au coeur de l’Europe centrale.

La nouvelle entité, qui s’appuie sur la plate-forme de distribution Central European Gas Hub (CEGH) opérée par OMV à Baumgarten, a commencé fin 2009 à proposer des contrats spots. Le négoce de contrats à terme était alors planifié pour une mise en oeuvre au printemps. L’objectif à terme est de faire du CEGH « la première place d’Europe continentale pour le commerce du gaz », avait alors précisé OMV.

Le début des opérations en Bourse marque « une nouvelle étape pour la création d’un marché européen du gaz » et « renforce la sécurité des approvisionnements« , avait alors déclaré le ministre autrichien de l’Economie, Reinhold Mitterlehner. On ne  demande qu’à le croire …

Parallèlement, OMV s’associait à Gazprom pour développer cette plate-forme de distribution en Autriche, l’une des trois plus importantes d’Europe continentale. La structure dessert, outre l’Autriche, l’Allemagne, l’Italie, la France, la Slovénie, la Croatie et la Hongrie. OMV et Gazprom devraient détenir chacun 30 % du Central European Gas Hub.

Mais le nerf de la guerre est bien là : la plate-forme de Baumgarten doit se trouver sur le parcours des projets du gazoduc russe South Stream et européen Nabucco.

Située « idéalement » au débouché du gazoduc Droujba, elle voit transiter annuellement 55 milliards de mètres cubes de gaz, principalement de Russie et de Norvège. En une sorte de goulet d’étranglement ou noeud de transit gazier (ou hub) quasi-incoutournable ou presque, surtout si tout est fait pour le rendre ainsi. Permettant de tirer les ficelles de l’approvisionnement en gaz de l’Europe …..

 

A lire également :

. South Stream : création d’une société mixte Russie/Bulgarie

. South Stream : un possible accord Russie/Bulgarie en mai 

. Quand l’autrichien OMV était attaqué au Yemen … 

. Conflit Russie/Ukraine : l’Autriche à la rescousse via OMV

. Gazprom/OMV : bourse du gaz en Europe centrale ?