Marie Phoenix : Les lecteurs du blog finance souhaiteraient avoir la vision d’un professionnel sur le lissage des prix, le rattrapage des prix des quartiers moins cotés, qu’ils observent depuis des années. Je vous remercie d’avoir accepté de nous répondre aussi rapidement.
Agent immobilier (92) : En effet, depuis plusieurs années, un peu partout dans l’Hexagone, à Paris, Marseille ou Toulouse, on constate que les quartiers moins attractifs rattrapent les « beaux quartiers », et les biens moins cotés, les « biens de qualité ».
M. P. Comment expliquez-vous ce phénomène ?
A. I. C’est un phénomène typique d’un marché en surchauffe, en hausse. C‘est logique d’ailleurs, puisque le prix du m² augmente plus rapidement là où le prix de base est plus faible. Après la flambée des prix dans les zones les plus recherchées, ces zones moins chères attirent une demande qui ne parvient plus à être satisfaite dans des quartiers « moyens », voire les « beaux » quartiers, les prix dans ces derniers s’étant lissés eux aussi, donc étant sensiblement les mêmes.
M. P. Une sorte de contagion… de la hausse.
A. I. Il y a eu incontestablement un effet domino. Or l’arrivée de ces nouveaux acquéreurs, exclus des quartiers plus chers, en se rabattant sur des zones plus accessibles, en « surgissant » avec des moyens supérieurs à ceux de la population « locale » de ces zones, de la clientèle « traditionnelle », entraîne une flambée rapide et spectaculaire. Des hausses de 30 à 50% ont été enregistrées dans les banlieues moins favorisées ou les quartiers très populaires.
M. P. Les acheteurs n’ont pas conscience se surpayer des biens dont les prix ont explosé plus que de raison ?
A. I. Bien évidemment, mais ils n’ont pas le choix. Une nouvelle demande – inhabituelle arrivant, plus solvable, les vendeurs veulent en profiter et gonflent les prix autant que possible au fil des mois. Cela incite les gens jusqu’alors non vendeurs à le devenir et les prix continuent leur montée.
M. P. Les gens donnent l’impression d’avoir perdu le sens des réalités… d’être sous influence des publicités, des médias…
A.I. Encore une fois, c’est un comportement « logique ». Ce qui paraissait « invendable », ou trop cher, trouve plus facilement preneur dans un marché en pleine effervescence. Les gens se disent « si je n’achète pas maintenant, je ne pourrai plus le faire dans quelques mois ». Et l’emprunt à taux bas et des avantages fiscaux ont fait le reste.
M. P. Un exemple de lissage géographique des prix ?
A. I. Aulnay-sous-bois, un « cas d’école », est régulièrement cité par tous les spécialistes du secteur, avec une hausse voisine de 50% en 2004, et une hausse à deux chiffres en 2003. Personne ne se serait attendu à une telle explosion des prix. Nous étions inquiets et la flambée de violence de certains quartiers en novemebre 2005, est à mon sens indirectement liée à la dégradation de la situation du logement, et en particulier à l’exclusion à l’accession à la propriété.
M. P. Comment la situation évolue ?
A. I. Les flambées ont été réelles dans des zones défavorisées en 2005, contrairement aux quartiers chics, qui ont déjà repris le chemin de la sagesse. Ceux qui pouvaient y acheter l’ont déjà fait les années précédentes.
M. P. Il est fort à craindre que dans ces zones dites moins « attractives », où les prix ont le plus monté, la retombée sera la plus spectaculaire, fragilisant encore plus leurs populations.
A.I. Effectivement, la baisse risque d’y être plus rapide et plus marquée. Tout comme l’augmentation, qui y a été fulgurante, entre 2002 et 2005, une fois que les acheteurs n’ont plus pu enter sur les marchés qu’ils convoitaient et où ils investissent ou se logent traditionnellement.
M. P. Avant de vous quitter, et je sais que vous avez un RDV, une phrase sur l’état du marché immobilier français au premier trimestre 2006 ?
A. I. Dans les zones rurales et les départements dépeuplés, comme l’Indre, le Cantal, l’Allier, la Corrèze ou la Creuse, les prix du m² ont entamé leur baisse depuis plusieurs mois. Ce sont des départements peu peuplés, et qui ont un solde migratoire négatif ou stable. La montée des prix y a été totalement irrationnelle et le lissage incompréhensible.
M. P. Créée artificiellement grâce au mythe des richissimes anglo-saxons qui raflent tout dans nos villes et surtout nos campagnes. Sans oublier les riches parigots qui grâce au TGV peuvent travailler chez eux et vivre à la campagne. Et comme les 4 à 6 heures quotidiennes passées dans le train leur laissent du temps et de l’énergie pour les loisirs, ils retapent les fermes et font quadrupler leurs prix. Et le reste de la France ?
A. I. (Rires). Les départements qui ont une métropole importante, comme la Gironde, les Bouches-du-Rhône, la Haute Garonne et bien sûr l’Ile-de-France, ne montrent pas pour le moment de signes de baisse importante. Tout au plus une stagnation et une baisse ponctuelle sur des biens avec des défauts majeurs. Mais les acquéreurs sont de plus en plus exigeants et prennent leur temps, prospectent, négocient… Les loyers ne montent plus car l’offre est plus abondante.
M. P. Est-ce que les loyers baissent ? En ce moment, les gens cherchent à déménager pour moins cher.
C’est vrai ! A Paris et dans le 92, les loyers stagnent. Les baisses de loyers annoncés dans la presse n’incluent pas les charges et l’échantillon n’est pas représenatif du marché dans son ensemble. Les loyers ne baissent que très peu, surtout lors du changement de locataire si le précédent loyer avait été considérablement surestimé. Les gens cherchent à déménager pour moins cher, ils lisent la presse vous savez.
Mais la réalité ne correspond pas à leurs espérances et les 3 à 4% de ristourne qu’ils obtiendraient en déménageant ne valent pas la peine de déménager, de payer une agence et les frais de transfert. Cycliquement, nous voyons arriver des clients pleins d’espoir, mais au final ils renoncent, le jeu ne valant pas la chandelle.
M.P. Et les ventes ?
A. I. A la vente, les prix résistent mieux à Paris, où la demande est encore soutenue. Dans le 92 et dans le 78, les délais de vente s’allongent au fil des mois, et nous refusons les biens surévalués de plus de 10%, d’après nos critères. Surtout si le bien a des défauts majeurs.
M. P. Je vous remercie pour cet entretien. (Réalisé le 4 avril 2006 par téléphone)
En ce moment, les gens cherchent à déménager pour moins cher, un peu partout en Europe. En Italie, les loyers ont baissé de 10 à 15% en l’espace d’un an. En décembre dernier, l’un de mes amis a réussi sans difficulté à faire baisser son loyer de 15%, car il a trouvé plusieurs logements similaires au sien et dont le loyer était inférieur de 20%. La propriétaire a accepté sans discussions pour garder son locataire. Les propriétaires savent qu’ils ont tiré sur la corde, et que les loyers trop élévés par rapport aux revenus, qu’ils ont « imposé » temporairement, allaient redescendre sur terre. Les propriétaires ont de plus en plus un « profil bas ». Mais en Italie les gens sont réellement révoltés et des actions spectaculaires ont eu lieu, comme ‘l’invasion des pantins pendus dans Rome », représentants les propriétaires surendettés.
Le chiffre d’affaires des agences immobilières a plongé en 2005
Très beau travail Marie. Félicitations.
Et merci pour ton blog ! Je le lis tous les jours/…
Signé : Un ancien du forum immo de bourso (qui est devenu l’ombre de lui-même….)
Salut The bull,
Mais je te connais de bourso, voyons !
Merci pour les compliments, on a bien « causé », l’AI et moi, t’as vu ? (je l’en remercie encore !).
Qu’est-ce qui t’arrive ? Pourquoi tu es devenu l’ombre de toi-même, raconte STP.
Marie
Très intéressant , d’enfin avoir l’avis d’un professionel du secteur…
Merci encore à Marie pour son travail de recherche.
Je viens d’avoir un infrmation de mon banquier allant dans le sens de la stagnation du marché…
La solvabilité des acheteurs potentiels à atteint un niveau critique , et vu les prix déraisonnables demandés , les banques refusent dès à présent pas mal de crédits.
Ce qui immanquablement va encore augmenter le volume des biens à la vente , faute d’acheteur , et provoquera un assainissement du marché.
le mythe de la baisse entrainera la baisse et les gens ayant des moyens plus modestes pourront de fait recommencer à acheter.
Reste aussi à souhaiter que le même phénomène se produise pour le foncier , pour que les prix des terrains deviennent abordables..car là égalment il y a beaucoup trop de spéculation du fait de la réglementation limitant par trop les zones constructibles….
Salut Robinwood,
C’est vrai ce que tu dis.
J’aimerais bcp interviewer un banquier…
1. « le mythe de la baisse » : je dirais, la réalité de la baisse (même la FNAIM la confirme, c’est dire)
2. Tu as raison pour le foncier, il va résister plus longtemps… mais la baisse du foncier serait primordiale.
A+, merci de ton intervention, Marie
Bonjour, j’ai fait le tour du net, mais je ne trouve pas de noms de banquier à contacter.
Qq’un pourrait en suggérer qqs uns ?
D’avance merci, M
Bonsoir Marie ,
Je peux eventuellement poser la question pour un éventuel intervieuw !
Mais c’est une banque située dans le 04 ???
L’avis ne sera certainement pas le même que pour la région parisienne…
Dis-moi si c’est bon pour toi demain je lui téléphone pour demander son concours au blog !
Bonne soirée
Bonsoir Robinwood,
D’accord, un banquier connaît son métier, et la politique de sa banque en matière de prêts, qui a des succursales partout en France.
Mon mail est dans ma signature, mais préviens moi ici, STP, que tu m’as écrit. Parfois j’ai du mail à me connecter sur hotmail.
Bien à toi, Marie (mail dans ma signature)
« Immobilier : un banquier confirme la bulle et la stagnation » (publié avant-hier, voir la rubrique immobilier du blog finance).
C’est vrai que le blog finance a partagé avec vous cettte interview, mais il y a tant à dire… Un autre avis serait le bienvenu.
Si vous avez un peu de temps, préparez des questions.
Bonne soirée, Marie
Même si l
Comment pouvez-vous parler d’offre très réduite sur Paris/IDF alors que notaires et FNAIM concèdent une augmentation de l’offre de + 70% sur un an (mars à mars) ?
Non, le blocage/tassement est bel et bien lié à
– une augmentation de l’offre
– une diminution de la solvabilité des acheteurs.
Bonjour Marie !
« Mon mail est dans ma signature, mais préviens moi ici, STP, que tu m’as écrit. Parfois j’ai du mail à me connecter. »
Voilà, c’est fait ! Les renseignements sont envoyés par mail !
Bonne journée !
Bonjour,
Je suis d’accord avec l’affirmation que « la plupart des professionnels observent aujourd
Bonjour Pacha,
Je suis d’accord avec toi. Je pense effectivment que l’offre est nettement plus importante que ce que les professionnels veulent bien le dire…
Ils sont sans doute influencés par les déclarations et les communiqués qui insistent sur la demande, toujours soutenue d’après eux à Paris.
Merci Robinwood,
Je vais prendre connaissance de ton courrier.
Bonne journée, Marie
Ayant deux professionnels dans mes relations, ceux-ci attendent avec impatience une baisse des prix, qu’ils espèrent… lissée dans le temps. Ils redoutent un crach immobilier comparable à celui des années 90.
Pourquoi espérer une baisse ? les prix sont trop hauts, il n’y a presque plus d’acheteurs pour des produits « moyens » (3/4 pièces ou petite maison).
En parallèle, le nombre de refus de crédits de la part des banques a explosé. De nombreuses ventes sont ainsi cassées, une catastrophe pour un professionnel.
Bojour,
Je tenais a vous féliciter (comme beaucoup d’autres ont deja du le faire), pour vos contributions sur les blogs.
Votre plume est excellente, les analyses sont fouillées et détaillées…Je ne suis pas d’accord avec tout, mais le contraire serait inquiétant 🙂
Du super job.
Keep it on !